Aboutissement de plusieurs années de maturation, Sylvie Fontaine illustre dans son Poulet du Dimanche, une chronique de la métamorphose. Succession de saynètes de lavie quotidienne où chaque individu devient l'objet de mutations toujours déconcertantes, le livre met en jeu des rapports humains soudainement transfigurés par cette intrusion du fantastique. Suivant minutieusement ce principe, l'auteur dissèque tour à tour les frustrations et les bonheurs de l'adolescence, des rapports amoureux ou encore de la maternité. L'ensemble forme une narration muette qui, à tout s'enchaîne sans causes ni conséquences, invite à la contemplation.Sixième album de Sylvie Fontaine, notamment après Cubik et Calamity. Préface de Moebius.
Un petit homme rend visite à sa mère, il attend un moment sur le palier avant qu'un être énorme et dégoulinant lui ouvre la porte.« Mais vous n'êtes pas du tout ma mère !– Si, c'est moi mon chéri. Viens, prenons le thé. »Ils s'installent et le monstre maternel raconte les étapes de sa métamorphose depuis la mort de son époux. La douleur de la perte s'est répandue hors d'elle, l'a engluée peu à peu jusqu'à devenir cette masse liquéfiée qui réapprend à vivre.Raconté l'air de rien à l'heure du thé, Qu'est-ce qui arrive ? propose une allégorie percutante du deuil et de la résilience. Avec une image par page, des dialogues brefs et des couleurs réduites à des teintes ocres et sanguines, le récit utilise à merveille ces moyens élémentaires.Réalisé à la craie sèche de manière très dynamique, ce premier album signé Mehdi Melkhi présage de grands desseins.
Un beau jour du XVII siècle, le facétieux mathématicien Pierre de Fermat écrivit dans les marges d'un livre : «J'ai trouvé une solution merveilleuse, mais la place me manque ici pour la développer. » Un énoncé fort simple pour un théorème qui sera démontré... plus de trois siècles plus tard par le mathématicien anglais Andrew Wiles. Alexandre Kha délaisse le temps d'un court album le genre fantastique pour une approche plus documentaire, s'apparentant à sontravail pour la revue Topo. En retraçant l'histoire de ce théorème mythique, c'est une histoire des mathématiques en accéléré que nous délivre Alexandre Kha, mais c'est aussi pour lui l'occasion de relater une série de destins romanesques, une galerie de portraits de personnages en quête d'absolu, allant de l'anarchiste matheux Évariste Galois à Sophie Germain en passant par Paul Wolfskehl, que le théorème sauva du suicide. Adoptant un trait plus épuré qu'à l'accoutumée, Alexandre Kha s'essaie à des mises en page élaborées et propose des métaphores graphiques percutantes aux concepts présentés, tout en restant parfaitement lisible. À noter que ce récit figurera dans l'exposition permanente de la maison natale de Pierre de Fermat à Beaumont-de-Lomagne.
Les strips de the bus furentinitialement publiés entre 1979 et 1985, oubliés, puis réédités en album par Tanibis en 2012.30 ans après sa mise au dépôt, alors que le tour semblait bouclé, le bus reprend du service. Dépoussiéré, huilé, le véhicule sort du garage, l'homme à l'imperméable se poste à l'arrêt. C'est reparti pour un tour ! Les failles spatio-temporelles et les incursions incongrues du fantastique parasitent de nouveau avec brio et inventivité ce trajet routinier vers l'inconnu.Le bus 2 est plus que jamais une porte vers tous les possibles : à son approche la réalité vacille, les dimensions s'entremêlent, les rôles s'inversent… Si le bus en lui-même est toujours le même, quelques détails, comme les téléphones « intelligents » et le look des passagers, ancrent ces histoires dans le XXIe siècle. Mais on saisit surtout que l'humour absurde de Paul Kirchner est d'une vitalité indémodable. L'artiste se joue des époques, ajoutant à ses strips une pointe de mélancolie qui les rend encore plus percutants. Son univers, sous l'incidence croisée des tableaux de Magritte, de la série télévisée La Quatrième Dimension ou encore des pastiches de Mad Magazine, n'a pas pris une ride.Le bus avait été retenu dans la sélection Patrimoine du festival d'Angoulême en 2013.Ces nouveaux strips ont été partiellement prépubliés dans divers magazines : Aaarg! en France, Le Vif en Belgique et Tin House Magazine aux États-Unis.