Du rez-de-chaussée jusqu'au 102e étage, une radiographie de la vie des habitants d'un gratte-ciel, avec une situation cocasse par étage. Le roman domestique de notre époque.
Maître du récit fantastique, Keko s'attaque au Tour d'écrou (The Turn of the Screw, 1898), d'Henry James, peut-être l'histoire de fantômes la plus célèbre qui soit. Mais, contrairement à Guido Crepax qui en avait signé une adaptation, Keko n'adapte pas le roman : il en donne une suite !Souvenons-nous. Dans une vaste propriété de famille située dans la campagne anglaise, deux jeunes orphelins, Miles et Flora, sont placés sous la responsabilité d'une gouvernante, Miss Jessel. A la mort de celle-ci, une autre femme reprend ses fonctions, mais elle doit lutter contre les spectres de Miss Jessel et de son ancien amant, le valet Peter Quint. Le roman se terminait en laissant un certain nombre de questio ns ouvertes, dont s'est emparé avec délectation Keko,un dessinateur dont le thème principal a toujours été la folie.Une stupéfiante technique de hachurage associée à un usage savant des jeux de trames permet à Keko de jouer des niveaux de réalité, comme autant de rideaux qu'il roule et déroule au gré de ses besoins .
Un grand roman russe. En Russie, les grand-mères sont la mémoire vivante de l'histoire tragique de leur pays. Svetlana Alexievitch raconte qu'enfant sa grand-mère lui avait appris à écouter ce qu'on avait pas le droit de dire. Dans «Sourvilo,» Olga Lavrentieva donne la parole à la sienne.
Le grand Jules Feiffer signe ici son premier roman graphique, et rend hommage aux privés du cinéma noir et aux bandes dessinées de son enfance. À travers le destin de trois femmes fatales aux rêves enchainés, Feiffer revisite la grande dépression, les figures de l'Amérique de l'entre deux guerres dans une mise en scène éblouissante.
Lucie se fait un devoir de transmettre ses dons de sorcellerie à ses deux filles jumelles, Maud et Lise. Ces dernières dépasseront bientôt, et de loin, les dons médiocres de leur mère, pour finir par (littéralement) voler de leurs propres ailes, laissant seule Lucie, aux prises avec l'éclatement du reste de sa famille. Le dessin puissant, réel et magique de Benoît Guillaume au service de l'adaptation du roman éponyme de Marie NDiaye.
Anna est une jeune femme qui vit à Prague, et qui s’ennuie dans son couple. Son histoire familiale est compliquée et l’a éloignée de sa sœur jumelle. Sa vie s’emballe brusquement le jour où, confondue avec elle, elle se retrouve à fuir à travers la Bohème en compagnie d’un jeune homme dont elle ignore tout, prise en chasse par des tueurs de la mafia russe.Lucie Lomova, dessinatrice tchèque dont c’est le premier roman graphique pour adultes, signe un scénario digne d’Hitchcock, truffé d’humour, d’émotion et de rebondissements. Son graphisme « ligne claire » en sert parfaitement toutes les nuances.Anna en cavale est de la BD d’aventures à grand spectacle, menée tambour battant et traversée de nombreux personnages secondaires pittoresques. Une révélation !
«Ô Cruelle est le roman choral des intrigues amoureuses, des drames d'amour, des rencontres hasardeuses et d'un mystère qui plane au-dessus d'une forêt.» Qu'ils prennent l'avion, le train ou choisissent la marche à pied, les personnages de Nadja, tous auscultés avec la même finesse, sont conduits dans une nature mystérieuse.Les jeunes filles discutent alanguies sur les rochers, les couples adultères se dissimulent dans les sous-bois. Au bout du voyage, une maison où l'on ignore les fantômes et les machins bizarres.«Le rêve chemine linéairement, oubliant son chemin en courant. La rêverie travaille en étoile. Elle revient à son centre pour lancer de nouveaux rayons.» Ceci, c'est Gaston Bachelard qui le disait, mais c'est ainsi que Nadja, dans un ciel étoilé, met en scène ce récit où cruel est le mystère et cruelle la nature humaine.
Ce roman graphique brillant parle de corruption et de répression policière dans l'Égypte d'Hosni Moubarak, mais également de solitude et de folie. Salim, un fonctionnaire corrompu, détourne de l'argent public soi-disant destiné à payer les forces de police dans une ville qu'il a imaginée de toutes pièces, Khaldiya. Obligé de rédiger des rapports sans fin pour abuser ses supérieurs, Salim construit dans son propre appartement, avec de l'argile, un modèle réduit de cette ville fictive. Mais il est hanté par des rêves dans lesquels Khaldiya devient un concentré des problèmes posés par un régilme bureaucratique et autocratique. Il perd alors peu à peu le sens des réalités.Cette bande dessinée sur les maux de l'Égypte apparaît prophétique à la lumière des événements qui secouent le pays début 2011.
Cinq amis perdus de vue depuis longtemps se retrouvent dans une maison isolée à la campagne. Celui qui a pris l’initiative de les réunir se fait attendre. Ils ne savent pas pourquoi ils sont là. Ils tuent le temps en remontant des bouteilles de vin de la cave. Des souvenirs reviennent à la surface. Ils mesurent le temps qui a passé sur leurs vies, leurs rêves, leurs ambitions. Au fil des heures, les âmes se confessent. Et l’on apprend que l’une des deux jeunes femmes attend le retardataire depuis... quinze ans, depuis l’époque où il lui écrivait des lettres enflammées. Ce huis clos psychologique (un genre rarement abordé en bande dessinée), tout en subtilité, sera pour chacun un moment de vérité.Barbara Yelin a été l’élève de l’illustratrice allemande Anke Feuchtenberger (La Putain P., à L’Association) aux Beaux-Arts deHambourg et vit désormais à Berlin. Son premier livre, Le Visiteur, a paru à l’An 2 en novembre 2004 (collection roman visuel).
Dans le Moscou des années trente, deux écrivains discutent sur un banc, dans un jardin public. Jésus a-t-il réellement existé ? Tel est le thème de la discussion. Tout à coup, se produit un mouvement de l'air, et un personnage est là, assis sur le banc voisin, qui se mêle bientôt à leur conversation. Étranger ? Espion ? Ou intrus simplement ? L'inconnu montre ses papiers : il est en règle. Il est, dit-il, un professeur venu en consultation. Mais, curieusement, il a un don de vision et lit dans l'avenir. Peu après, l'un des écrivains meurt comme il l'avait prédit ; le second devient fou - c'était aussi prédit. L'inconnu, c'est le Diable, en visite dans le monde socialiste. Tel est le début de cet extraordinaire roman. Mais le début seulement. Car autour de Woland (c'est le nom qu'a pris le Diable), trois récits vont s'organiser et s'entre-tisser : la fantastique sarabande dans laquelle va être entraînée Moscou, et qui déchaînera presque une catastrophe nationale ; la rencontre, par l'écrivain devenu fou, à l'hôpital psychiatrique, du Maître , fou aussi, qui lui racontera son amour pour Marguerite
Quelques années après la mort de son père et de sa belle-mère, Joyce Farmer a entrepris de relater leur fin de vie.Cette chronique tendre et émouvante les suit pendant leurs quatre dernières années, dans leur pavillon au sud de Los Angeles. Lars et Rachel sont mariés depuis longtemps et s'aiment toujours. À mesure que s'accentue leur déchéance physique (et, en ce qui concerne Rachel, mentale), leur fille s'investit de plus en plus dans la gestion de leur vie quotidienne. Le thème de l'extrême vieillesse a peu été traité en bande dessinée (on songe à Éloge de la poussière, d'Edmond Baudoin).Ce roman graphique aborde des questions douloureuses comme la maladie d'Alzheimer ou les traitements infligés aux personnes âgées dans les établissements spécialisés. Il n'esquive pas les détails d'une réalité quelquefois sordide. Mais il est dominé par la célébration de l'amour, de la tendresse, de la sollicitude, du courage, de la bonne humeur et de la famille. Ce livre parlera directement au coeur de tous les lecteurs qui voient leurs parents ou grand-parents s'avancer à petit pas vers la sortie.
Ecrit dans un style très clair et volontairement non technique, le présent ouvrage examine les concepts fondamentaux d'une théorie de la BD qui a connu, depuis une quinzaine d'années, de profonds bouleversements. Il propose à la fois une rigoureuse évaluation critique des différents courants théoriques et une description originale des formes, des mécanismes et de la nature des littératures dessinées, basée sur les progrès les plus récents de la stripologie. Loin des afféteries d'une certaine littérature savante, il démontre la possibilité d'une narration par le seul biais de l'image et illustre l'impuissance de la sémiologie à en rendre compte, il montre que les relations entre texte et image ne définissent pas la bande dessinée, que les codes censés la caractériser n'en sont pas, que la distance entre le roman victorien illustré et la moderne BD est moins grande qu'on ne le croit. La question du statut des littératures dessinées n'est pas éludée. Un chapitre est consacré à la lutte séculaire contre la BD menée par les milieux d'éducateurs vitupérant tour à tour les Pieds Nickelés, le strip américain et le manga. Ce livre est pour finir une défense et illustration d'une littérature qui a constamment été victime des discours qu'on a tenus sur elle (nostalgique, universitaire, puriste, populiste).
Le poète Mickhaïl Lermontov (1814-1841) est un jeune homme lorsqu'il est envoyé en exil dans le Caucase pour avoir attaqué le Tsar dans ses textes. C'est isolé dans la montagne qu'il écrit, à l'âge de 22 ans, le roman Un héros de notre temps. Publié en 1840, le livre connaît un succès immédiat et deviendra un classique de la littérature romantique russe. Lermontov est tué dans un duel l'année suivante.Un héros de notre temps se déroule entre 1827 et 1833, au bord de la mer Noire et dans le Caucase. Il est composé de quatre nouvelles , qui ont pour principal protagoniste un jeune homme désabusé, Petchorine - véritable enfant du siècle russe. Celui-ci est présenté successivement de l'extérieur (par un tiers), puis de l'intérieur (par le biais de son journal). Mon âme est pourrie par le monde, j'ai une imagination sans repos, un coeur insatiable. Tout me semble petit, mon existence est plus monotone chaque jour. Bientôt, je prendrai la route. Mais pas en Europe !J'irai en Amérique, en Arabie ou en Inde. Je mourrai en voyage...à moins que ce rêve ne s'éteigne aussi. Céline Wagner signe une adaptation sensible, où l'âme russe s'exprime à travers un clair-obscur raffiné. Elle déploie en particulier un vrai talent de paysagiste.
Le 2 avril 1998, Maurice Papon, ex-secrétaire général de la préfecture de la Gironde, est jugé coupable de complicité de crimes contre l'humanité. Pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, la justice française condamne un ancien haut-fonctionnaire de Vichy.Crimes de papier est un roman graphique qui s'intéresse à l'après. A travers le destin d'un fils de déporté (personnage fictif) consacrant sa vie à la recherche des coupables, ce sont plus de soixante ans d'Histoire française qui sont passés au crible, avec tout ce qu'elle contient de tabous, de non-dits et d'oubli.Le livre s'interroge sur la construction de la mémoire et dévoile les soubresauts d'une longue quête de justice. Il montre comment l'histoire individuelle finit par rejoindre la grande Histoire en dévoilant ses blessures intimes. Le travail de mémoire devient alors une reconstruction permanente.Le jugement de Papon n'a pas seulement permis à la mémoire française de franchir une étape, il a fait émerger la chaîne des responsabilités dans l'acomplissement du crime.En ce sens, Crimes de papier nous plonge dans l'un des vertiges de notre modernité : cette faculté qu'ont les hommes de devenir les rouages d'une machine qui les dépasse. Le passé, comme miroir du temps présent.
Comme les deux autres romans de Kafka, Le Château et America, Le Procès ne fut pas publié du vivant de son auteur.Avant de mourir de tuberculose, à l'âge de quarante ans, Kafka avait demandé à son ami le journaliste Max Brod de détruire, après sa mort, toutes ses oeuvres non publiées. Cependant Brod passa outre les dernières volontés de Kafka et prépara le manuscrit du Procès pour publication, mettant de l'ordre dans les liasses des innombrables chapitres, dont certains n'étaient encore qu'à l'état de fragments.La première édition parut en 1925. Toute sa vie, Kafka écrivit de façon sporadique et le plus souvent très intensivement, pendant la nuit. Encouragé par Brod, qu'il avait rencontré à l'université en 1902, il publia plusieurs nouvelles, les plus célèbres étant La Métamorphose (1915) et La Colonie pénitentiaire (1919), qu'il écrivit alors qu'il travaillait sur Le Procès. A la même époque, il écrivit aussi la nouvelle Derrière la loi, qui figure dans Le Procès sous la forme de la parabole racontée par le prêtre.Des éléments de la vie personnelle de Kafka, faite d'une succession de frustrations, d'angoisses et de relations amoureuses contrariées, trouvèrent leur exutoire dans l'expérience cauchemardesque du Procès. Finalement, la seule chose à faire est d'accepter les choses telles qu'elles sont. Surtout éviter de se faire remarquer. Se taire, même si cela vous répugne. Comprendre que ce grand système légal repose sur une balance extrêmement délicate. Le Procès, réinventé dans ce roman graphique saisissant, est la sombre histoire de Joseph K., arrêté un matin pour des raisons inexpliquées et qui lutte contre un procès ahurissant.K. se trouve plongé dans une succession d'événements déconcertants, dans un climat de violence croissant qui le met au désespoir de prouver son innocence face à des accusations inconnues. Par la peinture très noire d'une bureaucratie autoritaire, qui écrase la vie des citoyens isolés, Le Procès est plus que jamais d'actualité.