En résidence pour une année à la Maison des Auteurs d'Angoulême, Jessica Abel et Matt Madden en ont profité pour réveillonner en famille avec Lewis Trondheim. Alors que tout un chacun se contenterait d'une coupe de champagne, eux se sont appliqués à dessiner des scènes, en s'inspirant des jouets des enfants éparpillés dans le salon. Ils ont ensuite réuni ces dessins et les ont assemblés en un récit.Le résultat a de faux airs de Toy Story, avec ses combats, ses fuites et son dénouement inattendu. Le tout, bien sûr, évoque le plaisir du jeu et la nostalgie de l'enfance, avec une grâce qui ne pouvait surgir que du hasard.
Vincent Vanoli, avec discrétion, impose l'une des oeuvres les plus fortes et les plus intransigeantes du paysage de la bande dessinée. Encore un cran plus loin dans l'expressionnisme paranoïaque qui est sa marque, cette Clinique, fable intemporelle sur les faux-semblants de nos sociétés, est probablement son livre le plus emblématique à ce jour. On y retrouve aussi bien l'atmosphère cauchemardesque des Contes de la désolation que le climat vosgien début de siècle de Simplismus ou de L'usine électrique. Saura-t-on si le narrateur, Monsieur Bubbendorf, était réellement malade, pour qu'on l'expédie ainsi à la Clinique ?
Faut qu'on y aille sinon on va louper le dernier drakkar, un titre en trompe-l'oeil pour un vrai-faux manuel de bande dessinée à l'usage de tout lecteur déridé.Comment construire des phylactères ? Comment surmonter les affres de la création ? Comment faire de ce chemin de croix une partie de plaisir ? Et surtout, comment trouver l'inspiration ? Muzo fait profiter tous les aspirants dessinateurs de ses conseils expérimentés. Dans cette fantaisie, le lecteur attentif pourra trouver les réponses aux questions qui l'obsèdent.Un livre à ne louper sous aucun prétexte donc (comme le dernier drakkar, d'ailleurs). Car même si deux vikings sont toujours un bon début pour faire une bonne histoire, il faut au moins tout le talent de Muzo pour nous instruire avec autant d'humour.
Au début des années soixante, Edmond Baudoin est appelé pour faire son service militaire, il est incorporé chez les hussards à Orléans. Même si la fin de la guerre est proche, l'armée française continue ses opérations en Algérie. Il sait qu'il devra tôt ou tard partir pour combattre, mais la feuille de routepour le départ n'arrivera jamais. Alors que ces camarades sont déjà sur place, il apprend qu'il n'ira pas, ses supérieurs ayant décidé de mettre à contribution ses qualités exceptionnelles de tireur d'élite dans des concours.J'ai été sniper retrace les souvenirs de l'auteur là où l'on ne l'attendait pas, lui qui préfère vraisemblablement ses pinceaux aux fusils.
Jusqu'où est monté le King avant sa chute finale ? Spiderman ferait-il un circassien de talent ? À quoi ressemblera Paris en 2050 ? Lucky Luke ressemblerait-il toujours à un cow-boy s'il portait un tailleur trop serré ? Vousintéressez-vous à l'art contemporain, au sexe, aux états seconds, au droit des animaux, aux mutilations ?Dans la lignée de Panier de Singe (prix Révélation au FIBD 2007) et Safari Monseigneur, Les petits boloss est un recueil de travaux où l'on retrouve avec bonheur la créativité et l'humour cru de Florent Ruppert et Jérôme Mulot. Courses poursuites, séances photo, faux making-of de vraies performances, ils mettent en lumière la trivialité des situations les plus extraordinaires, et jouent de leurs personnages comme du dessin : anamorphoses, coloriage, jeu de société et phénakiscopes sont aussi au sommaire.Sortez votre boîte à outils, vous avez du travail !
C'est le retour de Bouclette, Surfer Girl et Gypsy, les GTO's pour « Girls Together Outrageously », les groupies emblématiques qui ont embrasé la scène rock des sixties. Plus excentriques que jamais, elles poursuivent leur idylle auprès des icônes de la pop-culture que sont Brian Jones, Jim Morrison ou encore Jimmy Page. Avec l'appui de Frank Zappa, les voilà encouragées à enregistrer un album. Elles chantent admirablement faux pour exprimer leur amour des garçons. Alors que les discours féministes de l'époque présentent les groupies comme des femmes astreintes à la domination des hommes, elles revendiquent leur pouvoir et leurs libertés. La passion, le sexe, la drogue, la musique, tout s'entremêle.Dans la Face B d'Autel California, les héroïnes ont désormais quitté l'adolescence et perdent progressivement leur insouciance. C'est le temps des remises en question pour Miss Pamela des Barres, a.k.a Bouclette. Après le massacre perpétré par Charles Manson et sa clique de fanatiques au 10050 Cielo Drive, rien ne sera jamais plus comme avant. On assiste vraisemblablement au déclin de l'utopie hippie, les groupes se séparent et certaines étoiles de la contre-culture disparaissent définitivement dans l'alcool et les psychotropes. Du swing de Treat Me Nice à la ballade romantique Blue Moon, Elvis Presley, omniprésent, aura donné la tonalité du diptyque de Nine Antico. L'intensité de la narration ferait passer la fiction pour une réalité, ou alors la réalité pour une fiction, on ne saurait dire. Ici, rien n'est idéalisé, tout est très documenté et réfléchi jusqu'aux références musicales qui rythment le récit.
Le Mon Lapin de Killoffer se passera entièrement dans les bois, aura pour décor une mystérieuse et labyrin-thique forêt du fond de laquelle peut surgir quelque chose à chaque instant, dans laquelle se cache un loup derrière chaque arbre. Une série de collaborations sur tous les modes, décors/personnages, ping-pong, enchevêtre-ment, etc. Killoffer avec plein d'autres auteurs, Killoffer partout et partout mais autre chose que Killoffer.Ont répondu présent ! : Ruppert et Mulot, Sébastien Lu-mineau, Morgan Navarro, Jean-Yves Duhoo, Laurent André, et Ludovic Debeurme.
Edmond Baudoin est un grand portraitiste.Son livre Le Portrait est un des livres phares de sa bibliographie. Ces dernières années, dans Viva la vida puis Le Goût de la terre, en compagnie de Troubs, il est allé dessiner les gens au Mexique, puis en Colombie. Faire un portrait, c'est pour Baudoin l'occasion de parler et d'écouter, c'est un bavard à grandes oreilles.En séance de dédicaces, il est debout (il dessine toujours debout), en train de parler, parler, en regardant son lecteur, son auditeur, son interlocuteur, en même temps que son dessin, ce doit être peu ou prou la même chose. Baudoin aime les gens, il ne fait pas semblant. Que ce soit en Amérique du Sud, ou en Bourgogne, dans cette petite ville de Clamecy. Mais il n'aime pas n'importe qui, pas n'importe comment, c'est toujours, in fine, pour nous parler de politique. Eh oui : ça se fait encore.Dans cette ancienne capitale du bois de flottage, plus de 3 000 républicains ont défendu la IIe République lors du coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte en 1851. Baudoin a réalisé 44 portraits de gens de Clamecy dans les cafés, les marchés, la librairie, en essayant de voir un peu ce qu'il reste de tout cela aujourd'hui.Précédé par De barricades en barricades de l'historien Thomas Bouchet, le récit est coécrit avec la réalisatrice Mireille Hannon, à partir de documents historiques, il nous raconte cette période de résistance.
Jamais éditée en album, cette oeuvre de Massimo Mattioli, représentant 232 planches en couleur, est parue dans Pif entre 1968 et 1973. Elle a fait l'objet pour la présente publication d'un véritable travail de restauration d'orfèvre, page après page, d'après les parutions de Pif, ni les originaux, ni les films ne subsistant. Un chef d'oeuvre d'humour et de poésie pour tous publics, pour la première fois en librairie.
En 2008, Isabelle Pralong obtenait à Angoulême le Prix Essentiel Révélation pour L'Eléphant aux éditions Vertige Graphic. L'originalité et la sensibilité de cette jeune dessinatrice suisse passe un cap supplémentaire avec ce deuxième livre, encore plus atypique et audacieux : Oui, mais il ne bat que pour vous est la strophe finale du poème Pièce de coeur de Heiner Müller, dont chaque strophe forme l'intertitre de chaque chapitre.L'ouvrage alterne des scènes autobiographiques de la vraie vie, réalistes et croustillantes, et des scènes fantasmatiques de la vie imaginaire qui elles, se basent sur la fable bouddhiste selon laquelle pour se réaliser, il faut attraper son singe intérieur et pouvoir s'asseoir et boire le thé avec lui.
L'un des premiers défis fous de Lewis Trondheim (1992): celui de mener à bien une improvisation de 500 planches, pour apprendre à dessiner... et aussi pour faire preuve d'une impressionnante aisance à manier l'écriture d'un feuilleton en bande dessinée.
Un salon. Un homme dans une couverture chauffante et sa vieille mère, en conflit permanent mais inséparables, voici le décor et le casting de Flaschko. C'est cette atmosphère confinée que Nicolas Mahler a choisi pour aborder avec son humour acide, absurde et minimaliste de grands sujets de société tels que la famille, la solitude, l'enfermement, les addictions, le vieillissement ou la sexualité. Somnambules, frileux, amateurs de triple-sec, candidats pour la maison de retraite, fans de déchets ou de Sylvia Kristel, et aussi tous les autres, Flaschko est fait pour vous.Pour Noël, nous vous proposons cette nouvelle édition à l'italienne, un best-of largement augmenté dans une luxueuse reliure cartonnée, dos toilé.
On l'avait déjà remarqué à travers les strips de Lapin : Ayroles nourrit une fascination particulière pour le personnage de Killoffer. Il a passé le cap en décidant de lui consacrer un livre. Mon Killoffer de poche est drôle aussi pour ceux qui ne connaissent pas Killoffer.
Lorsqu'au début des années 90 les parents de Charles Berberian quittent Paris pour s'installer sur la côte d'Azur, il éprouve instantanément de l'aversion pour cette région et les gens qui y vivent, symbole du vieillissement de ses parents, lieu defutilité et de douceur factice. Pour tromper l'ennui lors de ses visites, il dessine ce qui l'entoure, croquant postures ridicules et rituels dérisoires, et finit par se laisser apprivoiser par le cadre qu'ont choisi ses parents pour leurs vieux jours. D'agacé et moqueur, son regard devient tendre, et se pose alors avec bienveillance sur les derniers moments de ses proches. Quand tu viens me voir ? est une promenade nostalgique au long des plages méditerranéennes, témoins immuables du temps qui passe. Charles Berberian partage avec nous, de son trait spontané et toujours juste, entre dérision, pudeur et sensibilité, le journal d’un déclin inéluctable.
Envoyé pour trois mois à Shenzhen, en Chine, pour superviser un studio de dessin animé, le Canadien Guy Delisle raconte par le menu les rapports parfois incongrus, souvent drôles, toujours enrichissants qu'il entretint tout au long de son séjour avec ses collègues et amis, malgré la barrière de la langue et avec un style unique, incisif et observateur.
josé Parrondo n'avait pas encore expérimenté la Collection Mimolette. Ce sera chose faite avec Les monstres ne savent pas lire l'heure, qui mettra en scène Monsieur Poupée aux prises avec un monstre, un squelette d'animal et une bande de moules... Pour enfants ? Peut-être, mais tordus, et pour adultes tordus aussi...
Créé pour l'hélas éphémère revue Strips, Le Pays des trois sourires est une série de 100 strips d'un Lewis Trondheim qui renoue avec l'univers métaphysique de Moins d'un quart de seconde pour vivre. Dans cet album le monde est plat. Dieu y a provisoirement l'apparence d'un plat de spaghettis à la bolognaise, et on se demande où va tout ça. Mais comme toujours avec Trondheim, les situations les plus abracadabrantes deviennent logiques.
Téhéran 1978 : Marjane, huit ans, songe à l'avenir et se rêve en prophète sauvant le monde. Traversant avec elle révolution, guerre, deuil, exil, mais aussi apprentissage de la vie, puberté, premières amours, nous la suivrons jusqu'à son départ définitif pour la France en 1994. Paru à l'origine entre 2000 et 2004 en 4 volumes, Persepolis est la première bande dessinée iranienne, l'autobiographie dessinée d'une orientale en exil.Depuis sa sortie, Persepolis a fait le tour du monde, est devenu un classique étudié dans les écoles et a fait l'objet d'une adaptation au cinéma de nombreuses fois récompensée. Pour fêter les 10 ans de la version monovolume qui regroupe les quatre tomes, L'Association se paye le luxe d'une nouvelle édition reliée et cartonnée dotée d'une toute nouvelle couverture et de pages de garde dessinées pour l'occasion par Marjane Satrapi.
Pour Killoffer, ce n'est pas tous les jours faciles d'être Killoffer. Il faut pouvoir assumer, se construire un personnage et surtout briller en société.Bref, « faire Artiste ». C'est pour cela que Killoffer se donne de grands airs. Mais voilà, Killoffer a beau être un génie des temps modernes, il n'en reste pas moins un être humain comme les autres. Il mange, il pleure, il boit, il chie et tout le reste aussi. Killoffer a également des peines, des tourments et des questionnements. Autocentré et désinvolte, vous apprendrez à l'aimer ou à le détester. L'ouvrage devait s'appeler « KILLOFFER, en long, en large et en travers » puis « KILLOFFER, en long et en large » pour finalement se nommer En KILLOFFER. Un titre simple, efficace et ingénieux, à l'image de son créateur. Plus qu'un recueil des planches mensuelles parues dans la revue Le Tigre, En KILLOFFER est une plongée dans la psyché, ô combien compliquée de l'auteur. À noter que la moindre anecdote relatée aurait été vécue par l'intéressé. Que demander de plus à ce virtuose de la ligne noire ? On ne le présente plus, Killoffer est exposé en galerie, Killoffer est un illustrateur de renom, Killoffer est membre de l'Oubapo, Killoffer est un des fondateurs de L'Asso. Et c'est pour cela que Killo est parfois « un petit peu » mégalo. Merci KILLO-FIER !
David B. est un génie. Il a reculé les limites de la bande dessinée et c'est tout naturellement qu'il s'en trouve, la plupart du temps, écarté des honneurs officiels réservés à ce mode d'expression. Ça viendra. Il est vrai que David B. ne rend pas la tâche facile aux béotiens, tant il s'écarte de tout : de lui-même et du monde. Mais pour mieux y revenir.Mon frère et le Roi du Monde, en partant de la commande d'une exposition pour le Festival de Colomiers et pour le musée de L'Abbaye Sainte-Croix-des-Sables-D'Olonne, est une suite de 36 diptyques, 72 portraits face à face qui, au delà de la virtuosité qu'on lui connait, vont explorer un ailleurs d'autant plus troublant qu'ils relèvent d'une inquiétante familiarité : Un David B. qui renoue, qui tourne autour, qui revient à SON sujet : un autre-lui-même : le frère. Un autre frère : le Roi du Monde. Une autre forme d'autobiographie : purement plastique, mais qui ne raconte pas moins pour autant (voir : plus, peut-être...) Une suite de dessins qui, en représentant le frère et la figure mythologique dont parle Rene Guénon, dessine UN portrait : celui de l'auteur à travers... son double ? Quel double ? Qui est le frère ? Qui est le roi ? Ne serait-ce pas toujours David ?... Mais un David toujours en devenir, toujours en recherche, toujours rêvélé et à la fois caché. Un David TOUJOURS : B.
Lapinot, le bras plâtré est face à un nouveau dilemme : doit-il ou non porter plainte contre les parents qui l'ont injustement tabassé dans un jardin public, après l'avoir pris pour un pédophile ? Tiraillé entre son besoin de justice et son empathie pour les familles de ses assaillants, Lapinot part se mettre au vert avec Richard. Une retraite compliquée, puisqu'une météorite s'écrase sur le capot de la voiture, alors qu'ils font une pause sur le parking d'un supermarché...Et les ennuis commencent ! Bastons, appât du gain, courses-poursuites en forêt, collapsologues barrés... Lapinot et Richard ne sont décidément pas au bout de leurs peines. Toujours en phase avec les obsessions de ses contemporains, Lewis Trondheim signe ici un nouvel album au goût musqué d'apocalypse, comme un mode d'emploi pour survivre en riant en milieu hostile, le cinquième de la série triomphante Les Nouvelles Aventures de Lapinot à L'Association.
C'est à l'Ouvroir de Bandes Dessinées Potentielles que le journal Libération s'est adressé cet été pour divertir ses vacanciers de lecteurs. Durant six semaines, les éminents ouBaPiens Ayroles, Gerner, Killoffer, Lécroart, Menu et Trondheim se sont attelés à une tâche un peu contraignante, à coups de pliages, d'itérations, de palindromes, de strips croisés, d'upside-down et de morlaques. Six exercices qu'ils ont chacun à leur manière menés d'une main de maître. Cet OuPus 3 qui paraît avant l'OuPus 2 prévu courant 2001, réunit l'intégralité de ces travaux. Un cahier détachable de 12 pages est encarté pour permettre au lecteur d'effectuer les exercices de pliage sans abîmer l'ouvrage.
Depuis Lamort & Compagnie (1998) et Bosnian Flat Dog (2005), Max Andersson revient enfin à L'Association après douze ans d'absence. Et on n'a rien perdu pour attendre. Ce livre relié au petit format est un concentré d'apocalypse dans lequel Max Andersson creuse et déterre les vestiges d'un monde enfoui dans les ténèbres. L'Excavation est un merveilleux cauchemar interminable où tout est cassé ou en voie de rupture, les choses comme les êtres, où tout est en décomposition ou en voie d'extinction, le pouvoir comme la résistance, où tout est absurde et drôle, comme un désespoir qui aurait encore du savoir-vivre. Encore un peu. Pas pour longtemps. Dépêchez-vous.
Pour son numéro 7, Mon Lapin Quotidien se propose de donner la part belle à nos auteurs, auteuses, autrices motrices tirant avec force les wagons d'oeuvres artistiques qui peuplent les pages du journal depuis de nombreux trimestres.Du roman-photo sentimental au pamphlet coup de gueule, de la chronique autobiographique au projet muséal, les muses s'amusent autantdans la colonne que la rubrique, en vrac, de bric, de broc, voire à brac, fières à bras pas sexistes accueillant un supplément «Monsieur» et l'équipe habituelle dont la réputation n'est plus à faire, elles se déchaînent avec inclusivité pour vous inviter à passer à l'acte d'achat, la lecture, la courbure et la pointure.
Août 2017 : sur un quai de gare à Nice, Edmond Baudoin croise Mariette et sa fille Lou. Sa quête de l'humain s'arrête sur leur regard. Il revient de La Roya où il travaillait avec Troubs pour décrire le quotidien de ceux qui aident les réfugiés en difficulté (Humains, La Roya est un fleuve), elles rentrent de Suisse, à pied, du lac Léman à la Méditerranée, le long de cette frontière intangible et pourtant si sévère pour ceux qui tentent de la franchir. Mariette et Lou ont une histoire, terrible : elles ont perdu un mari et un père brutalement en montagne, en 2009. Depuis, elles partent dès qu'elles le peuvent toutes les deux, marcher et explorer la montagne, partout dans le monde, comme il aimait le faire.
Lewis Trondheim et Brigitte Findakly forment en bande dessinée comme à la ville un duo depuis de nombreuses années. Si la bibliographie pléthorique de Lewis Trondheim n'a plus de secret pour personne, celle de Brigitte Findakly, son épouse et coloriste, quoique toute aussi importante, reste pourtant moins connue. De Pif Gadget, à ses débuts, au Chat du Rabbin, des Formidables aventures de Lapinot au Retour à la terre, on lui doit la mise en couleurs d'une centaine d'albums. Avec ce livre à quatre mains, pré-publié en partie dans « Les strips de la matinale » du Monde, Lewis Trondheim délaisse pour la première fois les animaux anthropomorphisés pour raconter l'histoire de celle qui partage sa vie, née en Irak, d'un père irakien et d'une mère française à l'orée des années 1960. Coquelicots d'Irak retrace son enfance passée à Mossoul, ville du nord de l'Irak, à une époque où, bien avant l'arrivée au pouvoir de Saddam Hussein, se succèdent coups d'État et dictatures militaires. Déroulant le fil de ses souvenirs, on découvre alors une vie de famille affectée par les aberrations de la dictature et leurs répercussions sur la vie quotidienne, jusqu'à un inéluctable exil vers la France au début des années 1970.Une arrivée en France elle aussi difficile, une expérience migratoire faite de difficultés administratives, sociales et culturelles. Dans ce récit qui prend pour toile de fond une triste actualité, Lewis Trondheim et Brigitte Findakly brossent en saynètes percutantes et sans ambages, mais pas moins sensibles pour autant, la trajectoire singulière de la coloriste qui, pour la première fois, occupe le premier rôle dans un livre. Ponctué de photos et de parenthèses sur les coutumes, la culture irakienne et les souvenirs de l'Irak de Brigitte Findakly, on partage avec elle la nostalgie de ceux qui ont laissé derrière eux leur pays d'origine, et les liens fugaces qui subsistent, tout à l'image des coquelicots devenus si fragiles une fois déracinés.
Pour son numéro 14, MLQ décide de célébrer, à la lueur des étoiles et à grand fracas : LA NUIT ! Après un numéro 13 marqué par le fascisme, le nazisme et le macronisme, voici venu le temps de la nuit. Non pas celle des longs couteaux, ni de cristal (encore que...), mais la nuit tendre, la calme nuit, la sage nuit réparatrice et qui porte conseil, celle qui fait repartir de plus belle. Et aussi les autres nuits torrides et envoutantes qui, parait-il, sont au bas mot mille et une, dix-mille et une, cent-mille et une.Une infinité et une ! Mais si vous ne jurez que par le jour, alors, réjouissez-vous, car ce numéro nocturne de 16 pages sera en outre accompagné d'un supplément JOUR de quatre pages ! Avec, en bonus, pour le bonheur des pupilles et pour le même prix : une bichromie bleue nuit. Suite au numéro 13 et à la fusion cosmique Faucompré / Killoffer aux manettes du journal - et toujours avec Rocco aux manettes de la maquette, qu'on se rassure ! - de nouvelles recrues atterrissent sur la planète MLQ.Parmi elles Anna Haifisch, Charles Pennequin, Maïté Grandjouan, David Dufresne, Nathalie Quintane, Hector de la Vallée, Fantazio, Martes Bathori, Mrzyk & Moriceau, Baptiste Virot, etc
La Grande Guerre véhicule aujourd’hui encore une iconographie très marquée : le froid, la faim, les tranchées, les paysages dévastés, la violence des combats, l’horreur, l’uniforme des poilus, les gueules cassées, les masques à gaz, les baïonnettes, les explosions. La liste est longue, tant et si bien qu’il ne semble plus rester grand chose à apprendre de la guerre de 14-18. Les histoires créées pour Maudite ! reposent sur cet événement majeur du XXe siècle, mais les auteurs l’ont utilisé comme une matière première pour se livrer à leur propre imaginaire. Ici, vous ne trouverez pas de reconstitutions académiques de grandes batailles, de récits héroïques et encore moins de fictions documentaires. Vincent Vanoli a regroupé une vingtaine d’artistes afin de les faire travailler autour de ce sujet pour qu’ils réagissent avec leurs sensibilités individuelles. Résultat, ce collectif fait vivre une multiplicité de points de vue créatifs. Tous ont d’ailleurs pensé et réalisé leurs créations de différentes manières, mais ensemble ils façonnent une interprétation contemporaine, celle des auteurs de L’Association. Vous l’aurez compris, Maudite ! n’est pas un simple document commémoratif sur la Première Guerre Mondiale mais bien un lieu de confrontation des imaginaires à travers les symboles qui ont été engendré par ce conflit mondial.
Après l'excellent Mambo (Prix Artemisia 2012), Claire Braud revient enfin avec une nouvelle Eperluette.Alma, l'héroïne de cette fiction, dirige une petite communauté, qui vit en bordure de la jungle, dans ce qui ressemble bien à un paradis perdu, à l'écart de la civilisation. Leur existence est menacée par l'armée, qui capture leurs buffles pour nourrir ses troupes. Alma partie, de rage, détruire sa ferme, les hommes du village attendent son retour, occupés aux préparatifs d'une soirée d'anniversaire. Tous s'inquiètent pour leur ave-nir, dans ce pays menacé par l'armée, par les touristes et par la pollution.Avec ce récit mystérieux et sensuel, au rythme enlevé, Claire Braud confirme, après le ravissement de Mambo, tous les espoirs placés en elle.
Encore une fois, Ruppert & Mulot nous surprennent avec un livre inclassable, qui constitue sans doute l'un des livres-objets les plus atypiques que l'on puisse trouver au catalogue d'une maison d'édition. Un Cadeau est un livre dont il faudra découper les pages au fur et à mesure de la lecture, à l'image de l'étudiant en médecine qui découpe un cadavre à la recherche de son cadeau.Ruppert & Mulot nous raconte l'histoire d'un cadeau, offert à Noël dans la morgue d'un hôpital parisien. Face à cette situation simple, le lecteur réagira comme il peut, découpant son livre pour, lui aussi, tourner la dernière page avec un cadavre sur les bras. On retrouve le goût pour l'humour noir des deux auteurs, dans cette plaisanterie potache qui ne laissera personne indifférent.
HP est une grande fresque ayant pour sujet le milieu de la psychiatrie en France de-puis les années soixante jusqu'aujourd'hui. C'est par le petit bout de la lorgnette que Lisa Mandel choisitde raconter cette évolution historique, interrogeant parents et amis qui ont travaillé dans le secteur psychiatrique. Le caractère anecdotique de HP, ajouté au dessin léger et humoristique de Lisa Mandel, aurait pu édulcorer le propos, mais la véracité des faits est parfois si atroce ou si absurde que ce livre ne laissera personne indifférent.Dans ce deuxième volume, Lisa Mandel poursuit son exploration de l'histoire du mi-lieu psychiatrique en France. Ses parents et leurs amis ont chacun été affectés dans des services différents, certains adoptant des méthodes dites d'« avant-garde ». L'auteure aborde ici une période clé pour la psychiatrie qui sort de ses archaïsmes pour aller vers de nouvelles pratiques. Les années 70 ouvrent une période de libéra-tion morale, qui touche aussi le monde médical. Encore une fois Lisa Mandel s'ap-puie sur les témoignages de ses proches ayant travaillé dans cet univers. C'est la rencontre entre le dessin léger et humoristique de Lisa Mandel et la gravité des faits rapportés qui fait tout l'intérêt de ce second opus.
Dans une plaine inconnue, une colonie de moineaux s'interroge sur leur faim et sur la signification des choses, quand un événement imprévu va troubler la banalité de leur existence. Les faits étranges se multiplient autour d'eux, et peu à peu ils sont gagnés par l'angoisse. Dans ce monde indéfini, les moineaux doivent faire front pour éviter les disparitions, les attaques d'un aviateur échoué, et l'inconnu qui s'abat sur eux.Premier livre d'Anders Nilsen, entamé il y a quinze ans pour être achevé en 2011, cette épopée fantastique et subtile commence par la révélation d'un motif récurrent chez l'auteur dans ses essais de dessins automatiques : l'oiseau. C'est peu dire que ce récit, d'abord fondé sur l'improvisation avant de prendre forme jusqu'au dénouement final, s'attache à nous faire pénétrer dans un espace fantasmagorique et beckettien, qui coïncide avec les profondeurs de sa psyché. Comme les oiseaux, le lecteur est soumis à ce monde inconnu et mouvant, déstabilisant et totalement fascinant.Véritable révélation parmi la nouvelle génération des auteurs américains, Nilsen est sans doute celui qui a su le mieux s'affranchir de ses glorieux aînés. Big Questions montre que la bande dessinée peut encore nous surprendre, dès lors que l'auteur plonge au fond de lui-même pour en sortir des images dont l'étrangeté nous émeut et nous trouble.
Du swing de Treat Me Nice à la ballade romantique Blue Moon, Elvis Presley aura donné la tonalité de ce diptyque réuni aujourd'hui dans un coffret habillé par son autrice Nine Antico. De l'adolescence à la désillusion, Nine Antico nous plonge dans la culture américaine des années 50-70 et de ses égéries éphémères : Autel California ou le phénomène des groupies à l'heure de l'apparition du mythe moderne de la star.On assiste aux premiers pas de Bouclette, jeune fille encore naïve qui va bientôt réchauffer sa destinée sous les feux ardents des rocks stars pour devenir l'une des plus célèbres groupies. Nous retrouvons dans la Face B notre héroïne Bouclette ainsi que Surfer Girl et Gypsy, les GTO's pour Girls Together Outrageously en perte d'insouciance. C'est le temps des remises en question pour Miss Pamela des Barres, a.k.a Bouclette.Après le massacre perpétré par Charles Manson et sa clique de fanatiques au 10050 Cielo Drive, rien ne sera jamais plus comme avant. On assiste vraisemblablement au déclin de l'utopie hippie, les groupes se séparent et certaines étoiles de la contre-culture disparaissent définitivement dans l'alcool et les psychotropes. Nine Antico nous emporte dans un récit très documenté où l'on croise les icônes de la pop-culture comme Brian Jones, Jim Morrison, Jimmy Page, Phil Spector, Keith Richards ou encore Mick Jagger.
C'est dans le cadre des 24 heures de la bande dessinée du Festival d'Angoulême 2009 qu'ont été réalisées les 22 pages de Visite Express.« Une histoire muette dans le cadre d'un musée » : la double contrainte du thème donné alors, a amené Lewis Trondheim a imaginé une fable toute angoumoisine. Avec l'original du fauve sous le bras, la mascotte qu'il a crée en 2007 lorsqu'il présidait le festival, il part pour une visite privée et impromptue de ce qui est encore la future Cité Internationale de la bande dessinée. Soudainement surpris par une crue démentielle de la Charente, ce n'est qu'in extremis qu'il réussit à échapper à la noyade.Heureusement pour lui et le directeur du musée qui l'accompagne, les planches de bande dessinée des grands auteurs conservées par le musée, se font planche de salut...elles flottent à merveille. Drôle et acide, ce récit enlevé se devait bien de trouver sa place dans la collection Patte de mouche.
Chasse aux requins, mâles dominants, beuveries, défonce, désoeuvrement et inertie, le chaos règne sur le monde. Jeune ouvrier dans une usine à papier, Éric Palmer emménage en colocation avec Perry, un coureur de jupons désinvolte. Jusque-là, il supportait les dérives décadentes de ses amis, mais sa vie va prendre une tournure particulière lorsqu'il sympathise avec un de ses collègues, un marginal dénommé Billy Boy.Sous son influence, il plonge alors, tête baissée, dans un univers mystérieux et sinistre où triomphe la sorcellerie. Face au complot maçonnique, aux organisations souterraines, aux conspirations occultes, aux manipulations psychologiques et aux gnomes errants, notre héros n'a d'autres choix que de se lancer dans une quête moraliste impossible pour sauver l'humanité. Pour cela, il s'impose une discipline rigoureuse à grands coups d'introspection mystique, de gonflette et de régimes constitués uniquement de navets et d'huile de poisson.Tant que l'ordre des choses ne sera pas rétabli, le néant dominera la terre. Moïse des temps modernes, Palmer apprendra à ses dépens que nul n'est prophète en son pays. Highbone Theater raconte une saga étrange et hilarante imaginée par Joe Daly, l'auteur de la série Dungeon Quest. On retrouve dans cette fable psychédélique de 580 pages le goût du sud-Africain pour les blagues débiles, les personnages maladroits et les quiproquos vaudevillesques.Son style visuel troublant associé à son écriture, qui entremêle à outrance délires paranoïaques, références bibliques et ésotériques, évoque une série B hallucinée. Assurément, cette histoire aurait pu être une comédie « stoners», un genre cinématographique populaire aux États-Unis, prenant pour sujet de jeunes consommateurs de cannabis à qui il arrive de surprenantes péripéties.
Comment présenter L'An 01 ? Est-ce une bande dessinée de Gébé, un film de Jacques Doillon, un mouvement, une utopie ?En 1970, Gébé publie ses premières planches, et dans Charlie Hebdo l'aventure commence.Le premier livre qui les recueille paraît un an plus tard. Ensuite, c'est un film, que Jacques Doillon réalise, avec la participation d'Alain Resnais, de Jean Rouch, et de nombreux acteurs et amis : Coluche, Miou-Miou, Gotlib, Stan Lee.L'An 01, c'est l'envie d'en finir pour de bon, mais sans violence, avec une société morne et matérialiste, vendu comme un horizon indépassable. On arrête tout, là, maintenant, et on imagine, au fur et à mesure, le monde à venir. Le tout avec poésie et humour, avec une liberté et une joie qui ne manque pas de rafraîchir nos cerveaux engourdis. Pendant toute la durée de réalisation du film, Gébé dessine, dans ses planches, le film en train de se faire, prolonge le travail, répond au lecteur, rend compte de l'enthousiasme général. Le film, c'est l'Utopie en train de se faire, L'An 01 qui commence. La bande dessinée, elle c'est le carnet, la mémoire de cette révolution en marche. Le monde entier participe au film. Le scénario paraît en feuilleton dans Charlie Hebdo. Pour la première fois, les planches de Gébé et le film de Jacques Doillon seront disponibles de conserve. Écologie, amour, refus des rapports marchands, réinvention de soi et de la société : et si L'An 01 commençait pour de bon ?
Après Bande de sonnets qui puisait son inspiration dans la poésie classique, et après Le Cycle, L'Elite et Le Cercle Vicieux, Etienne Lécroart installe l'OuBaPo sur le terrain des mathématiques, à l'exemple des fondateurs de son prédécesseur litté-raire, l'OuLiPo. Eodermdromes, carrés latins orthogonaux, algèbre de Boole : Contes & décomptes propose de nouvelles contraintes, à partir de formules, de calculs et de figures géométriques, comme autant de casse-têtes ludiques à dé-chiffrer.Prenant appui sur le nombre d'or, ou sur le nombre Pi pour raconter ses vacances en Grèce, Etienne Lécroart aime à moquer la vanité humaine, les jeunes, les vieux, les savants et les légendes du Far West. Mais ces histoires recèlent aussi beaucoup d'émotion, dans la difficulté de communiquer, dans l'évocation de ses souvenirs et de ses peines.Avec ces contraintes mathématiques, Etienne Lécroart a trouvé la voie pour livrer son recueil le plus introspectif.
On connaît Haïti, malheureusement, par son omniprésence dans l'actualité, toutes les catastrophes politiques et naturelles auxquelles le pays a du^ faire face ces dernières années.Ici, pas de drame, c'est autre chose que nous proposent Grégoire Carlé et Sylvestre Bouquet. Animés tous deux d'une passion pour les mythologies et les cultures primitives des quatre coins du globe, ils ont obtenu en 2012 le soutien financier du Centre Européen d'Actions Artistiques Contemporaines de Strasbourg pour une résidence à Jacmel, en Haïti. Dans Trou Zombi (qui est le nom d'un lieu-dit haïtien), ils nous racontent par une série d'anecdotes souvent drôles leur quête mystique, qui les mènera jusqu' à une véritable cérémonie vaudou. Ils décrivent le quotidien le plus trivial de deux blancs-becs en Haïti, évoquent les odeurs, les sons et les images qui les assaillent, révèlent la manière très particulière dont les haïtiens, du moins ceux qu'ils croisent, vivent leur foi.Le récit est ponctué de magnifiques dessins pleine page, à mi-chemin entre icône religieuse et arcane de tarot, comme pour illustrer l'évangile de leur cheminement vers l'expérience ultime.Les styles graphiques très différents des deux auteurs se croisent et se répondent, chacun enrichissant de son point de vue la narration de l'autre. C'est une oeuvre ambitieuse qui mêle récit de voyage et témoignage humanitaire alimentée d'une vision onirique, poétique et d'autodérision.
En ce temps là, Joann était plus jeune, il faisait encore ses premières armes : des capes et des épées et se faisait les dents sur... TOUT. Déjà. Sa fringale ne connaissait pas de bornes et n'a jamais été rassasiée depuis. A (re ?)lire cet album édité pour la première fois en 1995, outre le pur plaisir de lecture que Joann Sfar a su nous communiquer par le pur plaisir de création qu'il a de toute évidence éprouvé à le faire, on est fasciné de voir la naissance d'un univers qui ira en se ramifiant, en se développant pour atteindre l'étendue que l'on sait aujourd'hui.Tout n'y est pas déjà, non, l'univers de Sfar est trop grand pour entrer tout entier dans les limites d'un seul livre, mais comme tout livre de Sfar, l'histoire qui se raconte, comme d'elle-même, toute seule comme une grande, nous parle d'autres histoires aussi, plante les germes d'autres univers, d'autres histoires, concomitantes ou à venir, évoque d'autres personnages, d'autres vies. Joann Sfar est, lui, déjà là tout entier, en revanche.Tout son enthousiasme, sa liberté, sa faconde. Dans les aventures picaresques du Borgne Gauchet (avec un T), mousquetaire plus Depardieu que D'Artagnan, plus Portos que Cyrano, brute lettrée, bretteur hors de pair qui baise à couilles rabattues la reine de Saba, tète des monstres, ferraille contre des spectres, le récit est débridé. Pas de limites à l'imagination, pas de bornes à la liberté.
Vingt quatre heures, pour Lewis Trondheim, c'est combien d'heures en trop, pour faire un album de bande dessinée ? Trondheim est un athlète, Lewis est un sportif. En 24 heures, il est à même de vous pondre un récit. Avec contrainte, qui plus est ! Mais ça n'étonnera plus personne... La prouesse ne réside pas là. Le tour de force, chez lui, consiste à nous faire croire que nous sommes intelligents. Nous SEULS avons compris, sous ses dehors bourrus, qui EST Lewis Trondheim.Lewis, en parlant à chacun de nous, s'adresse à tout le monde et, finalement, ne fait que parler de lui-même, bien entendu ! Sa maitrise du langage bande dessinée est telle que nous pourrons toujours le suivre n'importe où. Ici, sous une contrainte où il doit utiliser plus de 80 photos de l'Instagram de Boulet, il nous donne, en moins de 24 heures, un récit virtuose qui se joue des obstacles, qui slalome entre les écueils. Du grand art. Comme d'hab.
Diablotus soulève des cailloux au cas où ce serait le crâne d'un squelette pour pouvoir le jeter au feu. Diablotus est le premier volet de la série Enfer et Damnation.
De nouveau en coproduction avec les Éditions Moderne de Zürich, ce livre de Thomas Ott compile les meilleurs récits de ses trois premiers albums cartonnés, parus aux Éditions Moderne dans les années 1990 : Tales of error, Greetings from Hellville et Dead End, dans le même petit format cartonné avec dos toilé que les récents Cinéma Panopticum et 73307-23-4153-6-96-8. Les premières histoires de Thomas Ott, parues dans Strapazin puis dans Tales of error, ont marqué toute une génération par leur technique imparable à la carte à gratter, leur science de la lumière expressionniste, la noirceur insondable de leurs histoires, désespérées mais jamais dénuées d'une pointe d'humour. Explorant avec acuité tous les aspects du Mal (sexe, argent, crimes, jeu, etc.), Thomas Ott est une sorte de moraliste Rock'n'Roll : pas la peine de s'adonner au culturisme pour défendre la veuve et l'orphelin si c'est pour se prendre une bastos dans le buffet à la première occasion.
La Roya est un fleuve qui prend sa source en France, au col de Tende et se jette dans la Méditerranée à Vintimille, en Italie. Durant l'été 2017, Baudoin et Troubs ont parcouru cette vallée à la rencontre des membres du collectif « Roya Citoyenne », des gens qui, comme Cédric Herrou, viennent en aide aux migrants qui tentent de passer la frontière. Comme à leur habitude (Viva la vida, Le Goût de la terre), ils ont rempli leurs carnets de portraits et ils interrogent avec bienveillance et simplicité, la violence du monde et l'humanité qui en jaillit. Cette fois ils sont ici, dans le sud de la France, confrontés au racisme et à la solidarité. Cette question ne les quitte pas : « Pourquoi pour moi c'est possible et pas pour un Afghan, un Soudanais, un Érythréen, un... ? ».Préfacé par J.M.G Le Clézio, Humains interroge notre vivre ensemble et notre projet européen confronté aux migrations politiques aujourd'hui et climatiques demain et nous rappelle que ce que les états qualifient de flux représentent en fait de précieuses vies humaines.
Les strips de José Parrondo fonctionnent comme des énigmes. Le trait est simple, les images épurées, le style minimaliste, l'attraction instantanée. Mais face à ces pages à priori muettes, les questions affluent : cette fenêtre est-elle un tableau ? Ce paysage est-il factice ou réel ? Cet arbre est-il plat ou en volume ? Y a-t-il un Eggman ou plusieurs ? Est-il ici ou ailleurs ? L'action se déroule-t-elle à l'extérieur ou à l'intérieur ? Ce qui nous regardons est-il vraiment ce que nous voyons ? Autant de questions que chaque lecteur devra négocier avec son moi profond pour en découvrir le non-sens qui mène au rire véritable.Eggman, petit oeuf doté de courtes pattes et de yeux ronds comme des billes, nous entraîne dans un univers insolite où les jeux d'échelle, le trompe-l'oeil et l'illusion règnent en maîtres. Tableau, longue-vue, fenêtre, escalier, serrure, bulles de bande dessinée, ronds, carrés, tirets parsèment ses aventures. En mêlant objets identifiables et éléments purement graphiques, José Parrondo s'amuse avec les signes et les codes de la bande dessinée pour créer un univers délicieusement absurde et plein de dissonances poétiques, tout en jonglant sans retenue avec la rétine et l'intelligence de ses lecteurs.Pour cet album, José Parrondo alterne à nouveau les techniques : aux strips muets en noir et blanc viennent s'ajouter une série de peintures à l'acrylique mélangeant dessins, jeux de mots ainsi que quelques photographies.
On croyait tout savoir de la légende biblique de David et Goliath. Symbole de la victoire du faible contre le fort, de l'intelligence contre la force, ce duel à l'issue inattendue est un des mythes les plus connus, qui a déjà inspiré quantité de peintres et de poètes. Pourtant, Tom Gauld, qui avec ce magnifique ouvrage en bichromie, riche et plein de tension, faussement minimaliste, entre enfin dans le catalogue de L'Association, renouvelle le mythe et en donne une version surprenante et émouvante. Dans la lignée de sa « revisitation » du mythe de l'Arche de Noé vu par ses fils(paru dans Kramer's Ergot 6), il fait revivre le combat en suivant Goliath et son écuyer.Qui est Goliath ? Pourquoi a-t-il été choisi pour le duel fatidique ? Parce que c'est un géant et qu'il fait peur avec sa grande armure. Malheureusement pour lui, c'est tout et cela ne suffira pas face à la volonté divine. Prenant le point de vue du géant contre le berger, Tom Gauld nous offre un portrait de Goliath en victime - de son armée, de Dieu, ou de la malchance.
Littoral Un oiseau s'introduit par la fenêtre de la chambre d'une souris et lui tend une cassette VHS. Ni une ni deux, le mammifère aux rondes oreilles s'installe, un café à la main devant sa télévision - en réalité un ravissant théâtre miniature - pour visionner le film. Les images défilent, découvrant la vie de Joseph, jeune père à tête de renard qui travaille dans l'animation à New York et de Paul, son fils.Nous voilà embarqués pour un voyage dans le temps et l'espace, qui nous mènera des deli de Brooklyn aux briques rouges de Roubaix, de la vie à deux dans un étroit appartement new-yorkais au quotidien d'une famille recomposée dans une maison du nord de la France. Chronologique et elliptique, Littoral se déroule comme un film familial dont les images, capturées sur plusieurs années, s'altèrent parfois - cassette VHS oblige.Les épisodes présentés forment un collier de souvenirs sur lesquels Antony Huchette, avec son trait expressif, ses motifs et sa ronde de personnages à tête d'animaux, dépose une lasure douce et magique.
Remarquée avec Le Goût du Paradis (Ego Comme X, nominé pour l'essentiel Révélation d'Angoulême 2009), Nine Antico est l'une des jeunes dessinatrices qui se sont imposées ces dernières années. Son style, à la fois résolument contemporain et emprunt d'éléments stylistiques des années 1970, est déjà reconnaissable entre tous. Un style sur mesure pour Coney Island Baby, qui contrairement à son premier album, est ici une fiction, ou plutôt une étrange double biographie semi-imaginaire, basée sur deux figures féminines sulfureuses : la pin-up Bettie Page et la pornostar Linda Lovelace. S'inspirant des vies réelles de ces deux personnalités, Nine Antico construit un livre tout autant sensuel que mystérieux, revisitant aussi bien l'Amérique mythique que les coulisses du porno, et où revient régulièrement la figure charismatique d'Hugh Hefner, le légendaire patron de Playboy. Mais on aurait tort de croire que ce livre hors-normes (dont quatre chapitres ont été publiés dans Lapin) ne parle que de sexe.
Lapin, la revue historique de L'Association revient dans une (très) nouvelle formule, en grande forme et en grand format! Après Lapin, puis Mon Lapin, voici Mon Lapin quotidien, une chose encore jamais tentée : un vrai journal. Avec une flopée d'auteurs (pas moins de 60 !), dessinateurs, écrivains, vieux cons des neiges d'antan et petits jeunes de la dernière averse, mais toujours la crème de la crème. Dans cette avalanche de « mooks » épais mais plats, de revues plus ou moins classes et d'une presse atone, le moment était venu pour que L'Association lance la formule du journal qui fait du bruit quand on le secoue, et qui secoue les marronniers du journalisme et de la bande dessinée. Mon Lapin quotidien (MLQ), sur douze pages king size (41 X 58 cm), chaque trimestre, c'est forcément : de la bande dessinée, en planches ou en strips (Emmanuel Guibert, Lewis Trondheim, Lisa Mandel, Berberian...), mais aussi de la belle illustration (David B., Icinori, Anouk Ricard, Thomas Ott...), mais encore du cartoon (Stéphane Trapier, Antoine Marchalot, Ruppert et Mulot, Parrondo...), et également des textes (Éric Chevillard, Pacôme Thiellement, Denis Robert, Jean-Yves Duhoo...). Le tout dans des pages labyrinthiques et foisonnantes, pour parler de TOUT : tout autre chose que ce dont on nous rebat les oreilles à longueur de temps. Et pour ressembler à un vrai journal, celui dont on rêve depuis toujours. Ça va arracher, ça va s'arracher !
Ce long récit developpe le rêve de Mr T., qui dura plus d'un mois car il devait y terrasser tous ses démons. La maturité pour cet auteur espagnol qui signait Peter Pank ou Alphamax au début des années 80.
Dans la chambre d'un adolescent d'une banlieue pavillonnaire moyenne, un ver creuse les cloisons, attendant de muer pour prendre son envol : c'est un capricorne. Mais le grincement de l'insecte mordant les parois accomplit son oeuvre : ces quelques jours avant de partir en vacances, notre héros les vit avec des sens et un esprit éveillés.Le manège des habitants, la géo-poésie des lotissements, et surtout les figures légendaires qui président à cela : dans cette déambulation, banalité de l'existence et mythologie mélancolique s'entremêlent pour dévoiler les rapports cachés de l'existence. Mêlant l'évocation nostalgique des fins d'été languissantes, la rêverie inspirée avec la description du monde mythique qui gouverne les humains, l'auteur de Baku rappelle que l'adolescence est, comme le Capricorne, le signe de la naissance à soi. En compagnie du capricorne, c'est à une exploration de la géographie occulte de l'adolescence que nous convie Grégoire Carlé. Invoquant Dédale cherchant la sortie de son labyrinthe pavillonnaire, ou Philoctète ramené à Ulysse par Néoptolème, l'auteur de la Nuit du Capricorne redonne au passage vers l'âge adulte toute sa profondeur, et à la vie son enchantement.
Commencée en 2004 dans Charlie Hebdo, la parution de La vie secrète des jeunes fête déjà sa huitième année avec ce troisième opus. Fidèle à sa ligne de départ, Riad Sattouf développe une taxinomie sans appel des tares de nos contemporains, basées sur une stricte relation des conversations entendues dans les lieux publics. L'accumulation des planches donne une consistance impressionnante à l'ensemble, et la chronique devient autobiographie quand on commence à saisir les coïncidences et les obsessions personnelles de l'observateur.Sa fascination pour les dialogues aberrants ou son attrait pour les scènes de ménage misérables nous ramènent alors bien évidemment vers les thèmes favoris que Riad Sattouf développe dans son oeuvre de fiction (Pascal Brutal, Les Beaux Gosses...). Couples en débâcle ou insupportés par leurs enfants, célibataires dépressives, musulmans concupiscents, adolescents incultes : derrière le rire, c'est bien l'inquiétude qui pointe.La vie secrète des jeunes est donc plus qu'une légère rubrique de presse, et pourrait bien être la clefde voûte de l'univers de l'auteur.
D'après Sophocle, c'est en partance pour Troie qu'Ulysse et ses hommes abandonnent Philoctète à ses douleurs sur l'île de Lemnos. L'Argonaute, depuis qu'il avait été mordu par un serpent au sanctuaire de Chrysa ne cessait de souffrir, et ses cris insupportaient les Grecs. Philoctète, en Robinson antique, y passe donc dix années à survivre en maudissant Ulysse et sa lâcheté. Quand les Grecs comprennent qu'ils ne pourront faire tomber Troie sans les flèches d'Hercule, ils reviennent l'embarquer pour gagner la guerre.Voilà la version la plus connue, telle que racontée depuis toujours d'après Sophocle. Toute-fois Grégoire Carlé rapporte un détail d'importance omis dans la tragédie antique : l'île de Lemnos n'était pas déserte, mais peuplée de farouches amazones, obsédées sexuelles, qui menaient la vie dure au pauvre Philoctète ! Quand lui se contenterait bien de rester dans sa grotte et panser cette plaie qui l'épuise, les Lemniennes l'harnachent régulière-ment à une table pour le violer sous prétexte de rituels religieux. Épié, chassé, capturé, le pauvre doit sans répit satisfaire l'hystérie sexuelle des amazones déchaînées, jusqu'à ce que le bateau d'Ulysse ne revienne accoster au rivage...Dans ce péplum moderne, porté par une vraie érudition, Grégoire Carlé retrace rien moins que l'affrontement, dans la mythologie grecque, des visions du monde masculine et féminine, qui débouchera sur la victoire du monde patriarcal et sur la rupture avec l'ap-partenance cosmique au grand TOUT un et indivisible. Philoctète et les femmes nous donne à voir ce monde qui fut et qui pourrait être à nouveau.
RG est à la fois un livre de création et un essai, une bande dessinée, un poème et un livre d'art. Un hommage à l'oeuvre de Hergé, un prolongement de cette oeuvre et un travail théorique sur elle. Cinq propositions de relecture de l'ensemble des aventures de Tintin (couleurs imprimées, formes dessinées, subtilités narratives, couleurs mentionnées).Fait à quatre mains, par Jochen Gerner et Emmanuel Rabu, ce livre s'intitule RG en référence directe aux initiales de Hergé. Cela fait également référence aux Renseignements Généraux, pour souligner les notions d'enquête et de révélations de ce projet. Enfin, ce titre reprend les initiales des noms des deux auteurs (Rabu Gerner).Le projet RG est une relecture chromatique littérale des aventures de Tintin. Il est composé de cinq parties : quatre parties image (Mégacycle, Ectoplasme, Supercolor, Cyclotron) et une partie texte (Gyroscope). Chaque titre est issu du lexique hergéen.Chacune des ces cinq parties propose une relecture de l'ensemble des albums - selon le postulat qu'une prédominance de couleur a gouverné la composition, les formes, les thématiques de chacun des 22 albums de la série.Si on ne présente plus Jochen Gerner, l'auteur, le graphiste, le plasticien, compagnon de route de L'Association depuis toujours, Emmanuel Rabu est un nouveau (bien)venu chez nous. Ecrivain, poète et musicien, on lui doit notamment Tryphon Tournesol et Isidore Isou (Le Seuil, 2007), Cargo Culte (Dernier Télégramme, 2007) ou Futur Fleuve (Léo Sheer, 2011).Pour les amateurs de Hergé et pour les autres, une vision de son oeuvre, à la fois chromatique, plastique, littéraire, sonore et à chaque fois inouïe.
Quel est le point commun entre Galilée, Robert Bresson, Ettore Sottsass, saint François d'Assise et Robert Walser ? Rien a priori, si ce n'est de se retrouver convoqués par Fabio Viscogliosi dans son dernier ouvrage, Cascade. Réflexions métaphysiques, bribes de souvenirs, références au cinéma et à la littérature se trouvent mêlées dans ce livre album haut en couleurs. Les 103 planches du volume constituent autant de tentatives d'arrêter le temps en isolant une idée, un souvenir ou une sensation et fonctionnent comme des variations regroupées sous une même atmosphère colorée. Fabio joueavec des formes aux couleurs franches et aux contours bien délimités pour bâtir des visuels ludiques à la limite de l'abstraction.Un travail qui évoque ses oeuvres à la peinture acrylique. Il met également en scène le fameux âne, alter-ego de papier et personnage récurrent de son univers graphique - figure que l'on retrouve également sur les pochettes de ses albums, car Fabio est également musicien. À la fois livre de notes et de souvenirs, Cascade s'attaque au joyeux chaos de la pensée pour tenter de le mettre en forme(s).Il s'agit de son troisième ouvrage publié par L'Association.
Comme reviennent les saisons, parce que c'est un trimestriel, et aussi parce que, tout comme les saisons, c'est la promesse d'un changement à chaque fois, mais d'un changement qui dit la résilience du monde. Jugeons-en : cette fois, c'est Erratum pour notre numéro 4. Nouvelle Formule, c'était le 3, la formule canal historique en 12 pages reprend ses droits. MLQ s'autorisant tout, s'autorise le repentir, sait si bien tout faire, qu'il sait même faire marche arrière ! Mais qu'on ne s'y trompe pas : c'est pour mieux vous surprendre, chers amis lecteurs, car, en ces temps de marche forcée vers... ben, on ne sait pas trop quoi, en fait, quoi de plus étonnant que le « en arrière ! » ? Le retour n'étant pas une reculade mais une avancée qui a fait un virage à 180 degrés. Pour ce numéro 4, on peut d'ores et déjà annoncer :Trois magnifiques pleines pages de Matti Hagelberg extraites de son grand oeuvre fleuve, Läski-Mooses, qu'il élabore régulièrement sous forme de comics d'une trentaine de pages. Il en est au numéro 35 et le monument achevé devrait en compter 50 !... Ces trois pleines pages grand format MLQ correspondront à 27 pages de son comics. Une histoire complète.Deux autres pleines pages de David B. Encore une histoire inédite autour d'un lieu. Mystère, inquiétante étrangeté, érudition et nuit...Une nouvelle page de L'Autofictif d'Éric Chevillard, une quarantaine d'aphorismes, de petits textes légers, drôles et poétiques autour des animaux qui pullulent dans son oeuvre. Le tout entièrement illustré par les athlètes qui ont remporté haut la main le dernier championnat du monde par équipe de dessins d'animaux !En plus de toutes nos merveilleuses rubriques habituelles ! Vive MLQ !
Enfant, il se pensait « nul en tout sauf en dessin » jusqu'au jour où le dessin est devenu son quotidien. Dans Edmond, un portrait de Baudoin, on retrouve Baudoin face à la vie, face à ses réflexions, ses rêveries de créateur, face à son besoin de peindre l'existence. Avec Éloge de l'impuissance, il défend son « impuissance de dire » ; pour lui tous ses livres lui servent finalement à exprimer cette fragilité.De fait, cet éloge fait écho à ses oeuvres les plus personnelles, paru pour la plupart à L'Association; Le Portrait, Couma acò, Éloge de la poussière et plus particulièrement Le Chemin de Saint-Jean dont le récit se situe à Villars. Edmond a grandi dans ce village de l'arrière-pays niçois, où il passe encore tous ses étés à dessiner et où la réalisatrice Laetitia Carton a tourné son portrait. Dans la nature, dans les montagnes, près de ses amis, de sa famille, sources d'inspiration inépuisables.Cette bande dessinée, contrepoint essentiel et indissociable du film, présente l'artiste bousculé dans ses retranchements les plus intimes. Du reste, les discussions complices avec la documentariste le poussent à exprimer son rapport passionnel au dessin, à la vie et aux Hommes. C'est le portrait d'un auteur atypique, d'un personnage unique, libre, humble et attachant, dont l'existence s'enchevêtre souvent avec ses récits.On le découvre ainsi poète, peintre et philosophe. Edmond demeure invariablement d'une grande générosité et d'une intense spontanéité aussi bien dans son éloquence que dans son art. Ce livre-DVD constitue un témoignage fort qui le montre comme un créateur permanent, à sa table à dessin comme dans sa vie de tous les jours. Le film peut tenir lieu de porte d'entrée dans son univers ou de document fascinant pour ses lecteurs de toujours.En somme, de la joie et du bonheur.
Échafaudant une oeuvre personnelle majeure avec autant de force que de discrétion médiatique, Vincent Vanoli est l'un de ces auteurs pour qui « édition indépendante » a vraiment un sens. Son nouveau livre, Le Passage aux escaliers, ajoute une nouvelle pierre à cet édifice hors pair. Recueil d'histoires courtes autobiographiques dans la lignée du Côté obscur du dimanche après-midi, il s'agit en revanche ici de « nouvelles » totalement inédites et composées pour ce livre. La majeure partie des histoires sont situées dans la Lorraine natale et actuelle de Vincent Vanoli. Le Tour de Mont-Saint-Martin, la plus longue histoire du recueil, est composée d'une longue promenade où l'auteur nous entraîne dans des souvenirs d'enfance d'une rare prégnance. Les souvenirs se mêlent aux épisodes contemporains, mais se mêlent aussi à des réflexions sur la condition ouvrière et à des évocations de célébrités musicales telles que Johnny Cash, Vic Godard ou Syd Barrett, sans que tout cela ne paraisse être issu de thématiques différentes. Mélancolique comme jamais, ce Passage aux escaliers confirme Vincent Vanoli comme un des auteurs les plus exigeants et importants de notre époque.