Avec ce quatrième volume du Manifeste incertain, nous partons sur l'Océan Atlantique jusqu'à Buenos Aires, puis nous plongeons dans le xixe siècle. Avec Friedrich Nietzsche, tout d'abord, et sa très élitaire conception de l'éducation ; puis avec Ernest Renan, dont nous suivons pas à pas la profonde crise de doute qui le conduit à quitter le Petit séminaire ; d'Arthur de Gobineau, l'auteur très contestable de L'Essai sur l'inégalité des races humaines, nous parcourons la vie en détail, ses idées désespérées et désespérantes, jusqu'à sa mort solitaire dans une chambre d'hôtel à Turin. Évoquant ces trois penseurs « réactionnaires », autour de questions brûlantes telles que l'élitisme, le racisme et la religion, l'auteur ravive un épisode crucial de sa jeunesse : deux ans passés dans une école « libre », dans le sud de la France, livré à lui-même, sans règles ni devoirs - d'où le sous-titre : La liberté obligatoire. Nous nous confrontons également, à travers ces récits entrelacés, au temps présent, à la télévision et à la mode culinaire.
C'est l'époque de la « drôle de guerre ». L'écrivain et philosophe Walter Benjamin vit à Paris depuis plusieurs années. Mais en 1939, comme tous les ressortissants allemands, il est interné dans un camp de « travailleurs volontaires » à Nevers. Libéré après deux mois et demi grâce à l'intervention de plusieurs amis, il regagne Paris jusqu'à l'arrivée des troupes de la Wehrmacht. Il s'enfuit, et commence pour lui une errance dans le Midi, d'abord à Lourdes, puis à Marseille, d'où il tente en vain de s'embarquer pour les États-Unis. Son périple se poursuit dans les Pyrénées, jusqu'au poste-frontière espagnol de Port-Bou où, menacé d'être livré à la Gestapo, il se donne la mort.Ce récit s'entrecroise avec une évocation du poète américain Ezra Pound, exilé à Rapallo, au nord de l'Italie fasciste, dont il partage aveuglément les opinions. À Rome, le poète rencontre Mussolini dans le but de se mettre à son service, mais celui-ci décline la proposition, convaincu d'avoir affaire à un esprit dérangé. Arrêté en 1944 par les Américains, condamné pour trahison, il est enfermé à Pise dans une cage en plein air, avant d'être interné durant treize ans dans son pays. À travers ces deux figures antagoniques se dessine une époque, petites histoires dans la grande Histoire, qui nous parle à demi-mots du temps présent, de ses idéologies, de ses angoisses, de ses espoirs.Walter Benjamin et Ezra Pound : deux individualités se croisent sans se rencontrer. Tout les oppose, mais ils sont les témoins d'un même naufrage. Le premier porte sur le monde un regard lucide et critique, voire désespéré ; le second se rengorge des illusions de son époque aveuglée par le progrès et la vitesse. Des histoires se racontent qui racontent l'Histoire.Un livre écrit et dessiné. Avec près de 150 dessins de l'auteur.