Cette petite nouvelle contemporaine prend la forme d'un catalogage froid des effets d'une perversion linguistique.Cet inventaire à la Prévert démantèle sans pitié les poncifs et les lieux communs résultants de l'utilisation excessive et inappropriée de la troisième personne du pluriel. Cette forme nous revient ici jusqu'à l'excès, jusqu'à l'épuisement, jusqu'à ce qu'elle ait définitivement perdu tout son sens.
Suintante et sombre, Ben parle de la rue comme on en parle dans une chanson.Pourtant ici la parole est quasi inexistante ; et quand elle est là, elle est vécue comme une agression, une brutalité de plus parmi toutes celles que le monde envoie à la face de nos deux protagonistes, marginaux et mélomanes. Tout ce qu'il y a d'amour reste dans le non-dit, dans le dessin construit ici comme une musique. Un air à la fois poétique et brutal qui nous entraîne, aux détours d'un amour naissant, fragile, dans les méandres amers du monde de Ben.