Cela aurait pu n'être qu'un récit burlesque, romanesque certes, mais loufoque voire foutraque. Cela aurait pu aussi être l'ouvrage d'une auteure (D. Goblet), talentueuse et reconnue, qui, dans une démarche empreinte de bons sentiments judéo-chrétiens, se serait mise au service d'un artiste brut (D. Théate) dont la jeunesse s'est fracassée dans un accident de moto...L'Amour Dominical n'est rien de cela.Récit d'aventure épique et relation d'un improbable triangle amoureux entre Hulk Hogan, la femme à barbe bleue et un orthodontiste criminel, cette création à quatre mains conjugue tout ce qui fait la singularité de Dominique Goblet avec les obsessions de Domi- nique Théâte : réinvention langagière, combats de catch et quête de l'amour absolu.Les aventures du célèbre catcheur et de sa charmante épouse barbu sont rythmées par les nombreuses pages issues du journal de Théate, rédigé au jour le jour sur ordinateur, où il décrit inlassablement son quotidien prosaïque mais aussi ce fatidique accident qui l'a privé d'une réussite conformée dont il projette les fantasmes dans son récit.La « magnifique Dominique » (surnom officiel attribué par Théate à sa comparse) se confronte ici à une poétique nouvelle, une déconstruction de la fiction dont elle s'empare avec autant de vir- tuosité graphique que de subjectivité et de profon- deur. C'est elle qui, par-delà le plaisir de la lecture d'une histoire rocambolesque, nous invite à la méditation et nous aide à envisager nos propres fragilités et notre finitude.L'Amour Dominical est l'aboutissement d'une véritable rencontre au long cours, d'une déflagration artistique entre deux mondes (l'art et l'altérité) et du cheminement de deux êtres qui, ensemble, font acte de résilience.
« À un moment, tout est calme, tes yeux voient...Tu es à la base. Tu sais que tu es à la base.Discrètement le flou apparaît, les choses...Leur sens disparaît. Il faut tout recommencer, errer. Je ne sais pas comment font les autres.Certains ont des objets, des danses ou des chorégraphies.Des souvenirs aussi. Mais ils disparaissent, on les oublie. » C'est décidé. Vous partez en mission. Dans la zone. Mais n'ayez crainte. Vous serez en contact avec la base.Vous trouverez un chemin. Intérieur et animal.Magique et lumineux.Guide de survie et encyclopédie hantée, manuel de bricolage et récit d'aventure, Base- Zone se situe à la croisée de la bande dessinée, du dessin contemporain et de la poésie. Au fil de presque 300 pages tracées au crayon sur du papier carbone, DoubleBob compose un ouvrage-monde, un grimoire intime qui mêle questions, inventaires et solutions. Si vous voulez survivre à la vie plus encore qu'à la mort, si vous voulez sauver l'enfant meurtri qui sommeille en vous, si vous voulez libérer votre âme prisonnière, ce livre est pour vous.
Coloriage, vie sexuelle des bêtes, plaisir sans risque, jeux des 9 erreurs, le tout rythmé par les meilleurs moments de la Vie d’Albert...On ne va pas s’ennuyer cette année sur les plages, dans les transports, au bureau ou entre amis : Steve Michiels est là. Avec cet ouvrage, vous serez en mesure de faire face aux temps morts de votre existence, mieux, vous ne cesserez d’y retourner à tout moment pour vous amuser et stimuler votre esprit. Si malgré tout, on vous trouvait en train de vous interroger sur le sens de la vie ou la société de consommation, vous ne pourrez vous en prendre qu’à vous même.Avouez-le, vous avez besoin de temps en temps d’un moment de détente. Pour cela, rien de tel qu’un professionnel. Steve Michiels a une solide expérience d’amuseur public dans les journaux belges, connus pour être parmi les plus joviaux au Monde. Son esthétique ronde et bonhomme sait à merveille nous parler de la face obscure de l’humanité, non pour nous tirer des larmes, mais pour nous arracher des sourires doux amers. Observateur bienveillant mais sans illusion, voilà un pédagogue qui a le courage et le mérite de nous ramener à notre condition : un animal aux moeurs bien étranges. Cahier de vacances pour la plage, la révolution et les dîners mondains est le partenaire idéal de l’homme moderne, l’amant caché de la femme au foyer, le compagnon de jeux de l’adolescent solitaire. Indispensable quand la température monte, quand l’ennui guette ou quand partent en fumée les faux semblants.
En réalité, ce ne sont pas deux personnages qui communiquent. Le petit bonhomme en bas à droite dans les cases et celui, en haut à gauche, qui apparaît et se transforme à volonté, ne sont que deux des multiples facettes de l'artiste. Silvestre fait parler les vides. A nouveau, il utilise les modèles de la bande dessinée pour les détourner et les remodeler à sa façon. Comme les conventions le veulent, tout se passe dans des cadres. Il y en a quatre. Comme pour singer ce genre auquel il se rattache sans vraiment en faire partie. Silvestre joue aussi avec les genres et les graphismes. Le policier, le fantastique, le film noir, le conte s'invitent. Le cubisme devient d'une précision géométrique, la caricature est plus vraie que nature, l'art abstrait devient concret. Silvestre joue aussi avec les effets de surprise, faisant apparaître et disparaître des créatures d'un autre univers. C'est ainsi que s'exerce sa toute-puissance. Finalement, Silvestre joue à nous déconcerter en jonglant tour à tour avec le texte et le dessin. Jusqu'à ce que les cadres s'effacent, que les monstres s'évanouissent pour laisser le champ libre à la parole écrite. L'auteur tombe le masque et se confie à coeur ouvert pour expliquer les raisons qui le poussent à créer : faire quelque chose de neuf en s'éloignant du consensus. Le dessinateur transmué en écrivain essaie d'être clair mais tout ce qui paraît simple est bien compliqué en vérité.
Après 36 ans de déloyaux services au profit de la bande dessinée, Alex Barbier remet son tablier avant un arrêt définitit. Il n'a plus rien à dire. Il a tout dit. Il est vidé.Et pour cause, cette « Dernière Bande », plus hard, poétique et vénéneuse que tout ce qu'il a fait jusqu'à présent.Célébrons cet adieu à la scène et accueillons avec perte et fracas cette oeuvre ultime.Voici ce qu'en dit l'artiste sur le départ:« Après, terminé! Plus personne n'entendra parler de moi. Cette chose, est en effet venue comme une conclusion.Je désire brasser tous mes thèmes, toutes mes ambiances, tous mes paysages, tous mes personnages, et ainsi récapituler, résumer, pour moi-même, une histoire, celle de MES B.D., celles qui m'ont fait, triste chose que je suis ... » Inventeur de la couleur directe, Alex Barbier a infusé le trouble littéraire et pictural de la contre-culture dans le champs de la bande dessinée. Peintre de la chaire désirante, il revient pour un ultime tour de piste, son adieu à la bande dessinée.Héritier de William Burroughs et Céline autant que de Francis Bacon, il livre ici son oeuvre la plus violente et incarnée, la plus charnelle et incendiaire.Après la réédition de ses livres historiques Lycaons et Le Dieu du 12, après sa trilogie Lettres au maire de V, il ramasse et remet sur le tapis le théâtre de ses obsessions : Le casino de V. et son dernier habitant confronté à ses ruines d'humanité. Reclus dans ce lieu improbable, livré aux sarcasmes de politiciens extraterrestres, dans un dernier geste avant la dislocation, il convoque la cuisine italienne, ses jeunes amants pasoliniens, autant que des figures de la bande franco-belge dans un ballet séminal de fureur et de désir.
« Je suis si sûr d'être vivant. Impossible que je meure, je suis tellement sûr d'être vivant. Je suis fort, je vais leur montrer, personne ne pourra plus m'approcher, ils me laisseront passer, ils s'inclineront, ils seront obligés de le faire... Ils auront tous peur de moi ! Cette ville m'appartient ! » Il y a peut-être un dieu dans la ville rouge. Ou un avorton minable. Il y a en tout cas une conscience qui visite, qui habite la ville. C'est avec du sang de boeuf récupéré dans les abattoirs de Charleroi que Michaël Matthys a brossé cette fresque sauvage et amoureuse.
Le dessin de couverture et le titre aussi sont assez obscurs pour inciter le lecteur à ouvrir l'album, pour découvrir ce qui se cache derrière tant de mystères. Il manquait sûrement au volume précédent des mémoires d'Amoros un peu de sentiment. Une lacune que ce deuxième volet réussit à combler.Oui, car il est bien question d'amour ou plutôt de fascination, comme la femme ténébreuse de la couverture nous le promettait. A tout roman historique sa bataille glorieuse, à tout polar sa femme fatale. Cava ne fait que respecter les règles du genre. Le scénario mise particulièrement sur le couple Amoros-Négri. Les années ont passé, le jeune journaliste travaille toujours à La Voz. En volant au secours d'une femme brutalisée dans un bar, notre héros reçoit en récompense des mains de l'amant de celle-ci un tableau. L'homme, aujourd'hui baron de Carvia, était autrefois entraîneur de boxe et trafiquant d'armes pour les troupes d'Abd-el-Krim à ses heures perdues. Devenu riche, le baron s'essaye à présent au trafic d'oeuvres d'art. Mais lorsque les sentiments se mêlent au banditisme, les pistes se brouillent et l'on ne sait si le devoir du journaliste est de dénoncer les contrebandiers ou de convaincre Lola de rester près de lui. Cava a mis en scène une seconde fois ce personnage irréprochable qu'un certain Eduardo de G uzman, bien réel, lui a inspiré. Rédacteur en chef du journal anarchiste La Tierra jusqu'en 1935, il a collaboré par la suite à plusieurs journaux de la même mouvance. Lorsque Franco arrivera au pouvoir, Guzman sera arrêté, emprisonné et condamné à mort avant que sa peine ne soit allégée. Il finira par être libéré mais ne pourra exercer son ancien métier. Alors, il se tournera vers la littérature. Les romans policiers auront sa préférence. C'est surtout le courage et la détermination de Guzman qui ont donné l'idée au scénariste de créer le personnage d'Amoros.
Il était une fois un livre précieux, épuisé depuis maintes années. Par la grâce d'un magicien de la technique, le Frémok ressuscite Hortus Sanitatis et ses splendides eaux-fortes.Frédéric Coché convie à une étonnante découverte de Bruxelles, cité où le moderne le dispute au monde ancien, les buildings européens y avalant les maisons biscornues. Peut-être est-ce pour cela que dans Hortus Sanitatis, c'est la Mort qui mène la danse. L'ambiance est à la liesse populaire : on célèbre le carnaval. Tout est sans dessus-dessous, on porte des masques et les puissants sont moqués. Dans ce chaos, il pleut des moules, que l'on retrouve dans une casserole, évocation de l'oeuvre du plasticien et poète belge Marcel Broodthaers. Au fil de son errance dans les ruelles, la Mort perd son combat contre la vierge Marie, incarnation de la fécondité, qui donnera naissance à un majestueux arbre de vie.
Dans le domaine de l'humour, et plus singulièrement de l'humour absurde, l'inspecteur Modo Quid constitue un personnage unique dans un univers extrêmement particulier. Entouré d'un poisson lobotomisé, une espèce de Watson dégénéré et de deux poules (para)psychologues passées maîtresses dans l'art de la télé-transportation, l'inspecteur est habité par un immense désespoir, ce qui donne un côté expressionniste au livre. Sa sensibilité à fleur de peau donne à Long l'occasion de pasticher romans à l'eau de rose et photo-romans de gare, avec une acidité de ton et de couleurs peu commune dans le genre du polar. Le récit alterne vivacité des roses, ocres ou bleus et sobriété des noirs et blancs, ainsi que deux techniques de gravure : la linogravure et le bois gravé (bois de fil). Au-delà de l'apparent delirium narratif, cet ouvrage souligne la maîtrise technique du graveur /dessinateur. Un album non seulement drôle et sombre mais tout simplement beau.
Dans un pays saturé de lumières et de couleurs, quelque part du côté de Perpignan, une épidémie aiguë de dénonciations encombrent la boîte aux lettres du maire de V. Les lettres dénoncent le laxisme des uns, la perversité des autres. Tout cela fait l'affaire d'un individu peu recommandable qui se présente sous le pseudonyme de L.G., coloriste. L.G. pour Loup Garou, évidemment.Des attouchements inadmissibles, des cadavres exsangues, des lieux abandonnés, un voyage assez bref dans les rues d'un ghetto new-yorkais, tels, parmi d'autres, les éléments du récit d'Alex Barbier : l'auteur qui aime à disparaître derrière l'anonymat de lettres inavouables, ici décadence du geste mallarméen, disparition élocutoire dans les bas-fonds de l'âme humaine.Barbier a décidé de montrer la Bête plutôt que l'Ange, à la fin, et ce n'est pas ôter l'envie de lire le livre que de le dire, c'est le monstre qui gagne. La boucle est bouclée et qui croyait prendre est pris. Lecteurs de tous les pays unissez-vous et lisez, le soir, dans vos chaumières, les récits terrifiants d'un coloriste psychopathe.
Je suis un ange aussi est le troisième livre de Michaël Matthys. Développé durant l'élaboration de son dernier opus Ville Rouge, commencé en 2006, l'auteur a choisi de travailler autour du thème de la fête d'enfants.Ces dessins préparatoires, esquissés au fusain et au crayon, devaient tout d'abord servir de base à la réalisation de grands formats. C'est sur la proposition du FRMK de réaliser un livre dans la collection Flore que le projet prend une autre tournure.À travers les crayonnés apparaissent des images d'anniversaires, comme sorties des photos souvenirs de notre enfance, mêlées à d'autres images où la rue semble défiler à travers les vitres d'une voiture. Des phrases écrites en rouge, au bas de quelques images, viennent interpeller les enfants de manière inquiétante et peu à peu ces empreintes sanglantes envahissent les pages.Ce troisième livre vient confirmer l'intelligence et le talent du plasticien Michaël Matthys, à qui le musée des Beaux-Arts de Charleroi, en Belgique a choisi de consacrer une exposition cette année.
Claire, une jeune fille en marge de sa famille, épouse Alain, un immigré sans papiers dont elle attend un enfant. A la mort de ses grands-parents, elle revit les moment clés de sa relation avec eux, avec son père, sa mère ou son beau-père. Les images déferlent par vagues et disent les ruptures, les rancoeurs ou les espoirs qui constituent le chemin d'une vie. Ecole de la misère jette une nouvelle lumière sur certains personnages déjà aperçus dans Nègres jaunes.Débuté il y a plus de quinze ans, ce livre permet à Yvan Alagbé d'aborder à nouveau des thématiques qui lui sont chères tout en ouvrant des pistes formelles radicalement différentes. En gommant les frontières entre passé et présent, en mêlant les points de vues des protagonistes, sa narration fait jaillir toutes les teintes de l'intime. A la fois sensuelle et grave, cette oeuvre longtemps attendue bouleverse nos habitudes de lecture pour nous émouvoir au plus profond.Ecole de la misère est une expérience unique tant pour l'auteur que le lecteur.
Ce livre est une oeuvre entièrement à part, à part dans le domaine de la Bande Dessinée, et au sein même du travail d'Alex Barbier. Un récit halluciné, un foisonnement visuel composant un univers de Science-Fiction que l'on pourrait de bonne foi attribuer à Philip K. Dick, si celui-ci s'était un jour emparé de pinceaux pour donner forme à ses visions.Une BD de genre en somme, mais bien plus largement, comme quand le Genre, trop rarement, se réalise en refuge de la pensée dissidente, en l'expression parfaite du malaise, de la solitude et de la démence moderne.Nous y croisons entre autres un Dieu, dont les pensées se matérialisent dans la réalité hors de tout contrôle et qui, retranché à Perpignan, dernière zone libre hors de l'influence des Couics, évolue dans un monde que les machines ont reconstruit en se basant sur la lecture. des Garçons sauvages, de William S Burroughs. oubliant d'ailleurs d'y intégrer des femmes.La beauté indéniable des planches d'Alex Barbier, la crudité de certaines évocations et l'amère mélancolie des personnages y sont restituées comme nulle part ailleurs, donnant dans le même temps à la Bande Dessinée ses lettres de noblesse.
« Souvenir d ' une journée parfaite explore les frontières ténues entre autobio- graphie et fiction et capture avec grâce la fragilité d'un souvenir lumineux.Longtemps épuisé, Souvenir d'une jour- née parfaite dévoile l'ampleur du travail de Dominique Goblet : intime, puissant. » Tout commence par une visite au cimetière.L'auteure tente de retrouver le nom de son père parmi une forêt de vies disparues, sans y parve- nir. Frappée par cette disparition, elle s'attache alors aux traces qui subsistent et à un nom en particulier : Mathias Khan (1945-1988).Mathias Khan, Memento Mori : Souviens-toi que tu vas mourir. Conscient de sa mort imminente, Mathias Khan retient le présent : il rejoint celle qu'il aime, profite d'une balade en forêt, essaie en quelques mots d'immortaliser la perfection d'un voyage vers la mer. Des souvenirs gravés dans un petit agenda, a present time book.« Chaque déchirure est une histoire. » Faute de pouvoir saisir la dernière présence tangible d'un père, le récit s'engouffre dans l'existence d'un autre. Passé, présent, la vie, la mort : le dessin même explore ce mouvement que nul ne peut interrompre, imitant sa fugacité, ou déployant sa densité. Pour vaincre la disparition, Dominique Goblet fixe mille sensations qui donnent corps au souvenir : un ciel tumultueux, une pluie fine, la beauté d'une lumière automnale, la quiétude de la forêt, la rondeur et l'éclat réconfortant des châtaignes - le fruit des défunts -, l'harmonie d'un moteur et de deux êtres à l'unisson.Publié initialement en 2001 dans le cadre du projet Récit de ville, Souvenir d'une journée parfaite rappelle qu'une cité se construit par strates : on y détruit, on y jette, on y brûle, on y meurt ; on y construit aussi. On y vit, on y aime.Édité à l'époque à 3000 exemplaires, le livre révéla une artiste majeure, consacrée par la suite avec Faire semblant c'est mentir. Depuis, Souvenir d'une journée parfaite Dominique Goblet a multiplié expositions per- sonnelles, collaborations et résidences, tant en Belgique qu'à l'étranger. Pour appréhender l'oeuvre de cette auteure de renommée interna- tionale, la réédition de Souvenir d'une journée parfaite était donc essentielle.