À travers quatre visites rendues à une amie atteinte d'une tumeur, qui voit sa vie se transformer radicalement, l'auteur s'attache à décrire les changements opérés dans le paysage, au fi l des années et de l'histoire d'un canton suisse qu'il a quitté il y a une décennie, mais auquel il reste fortement attaché. Il se questionne sur le devenir de cet environnement, et analyse avec ironie la vision idéaliste que certains visiteurs passés ont pu donner de leur séjour dans ces lieux. Sur un ton poétique, le sujet du changement et de l'impermanence des choses est traité à travers l'histoire, la culture, la maladie et l'amitié. Les quatre saisons constituent les chapitres de ce roman graphique.
En cent quatre-vingt pages que ne traverse aucun personnage, Martin Vaughn-James bâtit un univers obsessionnel d'une rare puissance à partir de l'incessante transformation de quelques lieux et quelques objets : chambres peu à peu envahies par le sable, murs qui se lézardent à vue d'oeil, larges taches d'huile, d'encre ou de sang, végétation proliférante qui recouvre des ruines, tableaux et cadres amoncelés dessinant le plus aberrant des musées. La Cage est un somptueux labyrinthe, un ouvrage étrange devenu un classique. L'ouvrage est accompagné d'une préface de l'auteur, qui le resitue dans le contexte des années 70, de la contre-culture et du Nouveau Roman.
Art médiatique conciliant l'image et le texte, la bande dessinée est née au creuset du journal : elle a dès l'origine exploité les enjeux de l'actualité, et a très vite imaginé des personnages qui sont eux-mêmes journalistes. Le lecteur croisera ainsi dans ce livre les parcours de nombreux héros reporters connus (Tintin, Lefranc, Fantasio, Jeannette Pointu) et moins connus (Marc Dacier, Guy Lebleu et bien d'autres), il se plongera dans l'histoire mouvementée des magazines (Pilote, Vaillant, Spirou...) et il pourra saisir les multiples interactions (historiques, culturelles, professionnelles, économiques) entre la bande dessinée et la presse.Si la perspective retenue concerne essentiellement la BD franco-belge, elle n'est pas exclusive : deux chapitres évoquent la tradition des comics anglo-saxons qui, depuis la naissance de Superman, a elle aussi vu naître un imaginaire du journalisme particulièrement riche. Le but de cet ouvrage est par ailleurs de montrer qu'en dépit de la mort de revues comme Pilote ou Tintin, la généralisation de l'album n'a fait disparaître ni les héros reporters ni la presse de bande dessinée.La troisième partie envisage ainsi le succès du reportage graphique et de magazines tels que La Revue dessinée,qui témoigne de la vivacité intacte des échanges entre le journalisme et le neuvième art. Maître de conférences à l'Université de Reims, Alexis Lévrier est spécialiste de l'histoire de la presse. Il a notamment publié Le Contact et la distance. Le journalisme politique au risque de la connivence (Paris, Les Petits Matins, 2016) et, avec Adeline Wrona, Matière et esprit du journal, du Mercure galant à Twitter (Paris, Sorbonne Université Presses, 2013).Guillaume Pinson est professeur au Département de littérature, théâtre et cinéma de l'Université Laval. Ses recherches portent sur l'histoire de la culture médiatique et il codirige le projet Médias 19. Son dernier ouvrage s'intitule La Culture médiatique francophone en Europe et en Amérique du Nord, de 1760 à la veille de la Seconde Guerre mondiale (Québec, PUL, 2016).
Je suis mon rêve est une bande dessinée historique qui aborde un sujet et une période mal connus du XXe siècle : la Seconde Guerre mondiale en Crimée et les souffrances d’une population exposée aux avancées et reculs des armées allemande et soviétique. Racontée du point d’un aviateur, l’histoire innove par sa densité thématique. L’anecdote historique, le récit familial, la longue durée des nations et le temps du mythe se relaient et se croisent sans arrêt. Œuvre d’une grande beauté formelle, Je suis mon rêve est aussi un témoignage indirect sur la guerre civile, en Espagne et ailleurs en Europe, et une réflexion très profonde sur la rencontre d’une destinée individuelle et des grands mouvements de la culture. Le roman graphique de Felipe Hernández Cava, l’un des scénaristes majeurs de la BD européenne, et Pablo Auladell est également une tentative superbe et poignante de donner forme à l’expérience de ceux qui font et subissent la guerre.
Le héros de Courir deux lièvres, John Caldigate,est un jeune homme qui après avoir contracté des dettes au jeu et s’être brouillé avec son père, part chercher fortune en Australie à l’époque de la ruée vers l’or. C’est en homme riche qu’il rentre au pays, où il épouse son amour de jeunesse. Un enfant leur naît, ils filent le bonheur parfait. Mais Caldigate n’est pas le seul à revenir d’Australie : une femme, pauvre et de mœurs suspectes, surgit tout à coup et se prétend son épouse. Quelles ont été les relations entre Caldigate et cette Mrs Smith ? S’étaient-ils vraiment mariés en Australie ? Et que veut vraiment Mrs Smith, outre l’argent qu’elle réclame ?Avec cette brillante adaptation de Trollope, le plus célèbre des écrivains réalistes de l’âge victorien, Simon Grennan propose un passionnant récit d’aventures, tout en reconstituant de manière très authentique la culture de l’époque.
« En sélectionnant et en présentant les documents proposés dans ce livre, nous avons cherché à donner une idée de la richesse de l'image humoristique en Angleterre, en France, en Allemagne et aux États-Unis - une culture dont William Hogarth fut le grand précurseur au XVIIIe siècle. Pour comprendre l'évolution des formes séquentielles qui ont fait le lit de la bande dessinée moderne, leurs interactions constantes avec des formes concurrentes dont nous ne soupçonnons plus l'existence doivent être prises en compte. Les «raisons d'être» des histoires séquentielles sont multiples, et elles ne deviennent intelligibles que si l'on tient compte des solutions alternatives qui se présentaient à ces dessinateurs.Il faut dire que la variété des expériences menées tous azimuts par les artistes humoristiques, dans ces pays et durant cette période, met à mal toute classification et suggère au contraire l'idée d'un véritable continuum. Du rébus au roman en estampes à la Töpffer, de la caricature politique à l'illustration romanesque, du feuilleton dessiné aux «macédoines» thématiques, les illustrateurs professionnels travaillant pour le ivre et la presse au XIXe siècle prennent un malin plaisir à générer des formes hybrides et à ne laisser aucun genre intermédiaire inexploré.Dans ce paysage décidément bien éclectique, on comprendra qu'il ne soit pas possible de fixer a priori - c'est-à-dire axiomatiquement - les limites de notre corpus. Il ne s'agit pas non plus d'aborder ces productions comme des approximations ou des tâtonnements qui tendraient peu à peu à se rapprocher de la seule forme réellement pertinente - la bande dessinée familière et transparente du XXe siècle. Nous nous proposons de les voir, au contraire, comme des formes dynamiques qui explorent avec audace leur propre espace de possibilité. Elles se rapprochent en cela des productions qui depuis une vingtaine d'années prolifèrent aux frontières du genre «bande dessinée» dans nos librairies.À l'instar de nos auteurs les plus inventifs, les créateurs marquants du XIXe siècle aimaient, en effet, l'ironie et la prise de risques : ils innovaient, tout en revisitant souvent des modèles qui apparaissaient archaïques ou dérisoires aux lecteurs de l'époque. Pour donner corps aux pressentiments que leur inspiraient les transformations du temps - le progrès industriel en particulier - ils faisaient feu de tout bois. Chris Ware, aujourd'hui, ne procède pas autrement quand il emprunte aux origines du cinématographe, aux funnies et aux réclames des années 20, aux diagrammes didactiques des années 50, les bribes d'un langage polyphonique qui lui sert à décrire l'Amérique contemporaine. Ce dialogue entre la «préhistoire» de la bande dessinée et les formes les plus innovantes qu'elle prend aujourd'hui est l'une des justifications de cet ouvrage. » Thierry Smolderen