J'ai vu un truc raconte l'escapade de deux enfants un après midi d'été.Après avoir volé une barque, ils remontent laborieusement le courant et tentent de surprendre, cachés parmi les roseaux, ces nudistes dont ils ont entendu parler.J'ai vu un truc est un récit court, léger, graphiquement somptueux, avec une touche de nostalgie et d'érotisme. Dessiné au crayon gras sur papier imbibé, il restitue à merveille la moiteur du bord d'eau, sa végétation sauvage, ses clapotis et les plis du courant, le tissu mouillé. Ce traitement graphique somptueux complète parfaitement la douce ironie qui baigne le récit, centré sur deux enfants maladroits, curieux puis mutins.
Quoi de plus plaisant qu’une promenade en amoureux le dimanche après-midi ? Monsieur s’adonne à la photo. En bon photographe amateur, il va choisir son modèle dans la rue avec l’aide de madame. Une fois qu’il l’à dans le viseur, il ne va plus le lâcher. Il va falloir user de méthodes dignes des meilleurs agents secrets. Ils vont le suivre partout tout. Mais si leur sujet était un dangereux criminel, un obsédé sexuel, un toxicomane ou bien pire encore : un psychopathe ?C’est avec un humour astucieux que Thomas Matthieu se livre à un étonnant jeu de piste avec ses deux personnages. Le type de la photo est une histoire prenante qui nous parle de voyeurisme et de ces jeux de l’imagination qui nous servent à transcender la banalité du quotidien. L’auteur a utilisé, pour son dessin, un logiciel de retouche photographique qui donne ce rendu graphique particulier et proche de la photographie.
Dans une forêt automnale, un couple cherche distraitement des champignons. Ils se taquinent, elle dessine à la craie l'ombre de l'homme sur un mur de briques abandonné, puis ils sont surpris par la pluie et s'abritent sous un abri improvisé. Dans un autre temps et ailleurs, le même homme est de retour du travail. Perdu dans ses pensées, il est soudain le témoin impuissant de la mort violente d'un passant.Ces deux anecdotes, seulement liées par leur protagoniste, se mélangent dans Barbecue, ou plutôt se fondent l'une dans l'autre comme dans un moment d'absence. Si le livre retrace avec précision deux moments vécus, le dessin de Bertrand Panier est le sujet même du livre. Les hachures fines qui saturent la surface de la planche font naître un espace indécis, à la fois profond et tout en surface. Les événements décrits par le récit deviennent, grâce au traitement graphique, à la fois des anecdotes légères et moments universels.
Le chaos s'installe dans un étrange troupeau d'herbivores lorsque son leader, vieux et affaibli, s'isole pour agoniser. Avant de mourir cependant, il choisit son successeur et l'envoie chercher la compagnie des hommes, seule à même de le former à reprendre la tête du groupe. La rencontre entre l'animal et un jeune couple occupant un phare sera en effet pour lui riche en enseignements. Ce que l'animal comprend au contact de la société des hommes le rend capable de devenir le leader de son groupe. Mais l'a-t-il appris en mimant le comportement de ses maitres ou par rejet de ce qu'il a vécu à leurs côtés ? Le récit, riche en métaphores, donne autant de réponses qu'il pose de questions. Bien que court, il adopte tour à tour le point de vue animal et humain. Chacun reçoit un traitement graphique particulier : le premier chapitre adopte le point de vue de l'animal, le second celui des hommes et le troisième fusionne les deux.Ressources humaines a été dessiné lors des 24 heures de la bande dessinée 2010, et entièrement redessiné pour l'édition papier.
Leem est un bibendum géant à la peau laiteuse, un cyclope sans bouche qui court sans relâche à travers des paysages de campagne et aux abords des villes dans un but mystérieux. Il se nourrit d'eau et de soleil, s'effondre pour dormir avant de repartir, jour après jour. La course de Leem est remplie d'obstacles. Prédateurs, steppes désertiques, orages, villes, montagnes, sécheresse, et humains sont autant de dangers sur sa route.Leem ne les anticipe pas, il court. Naître, grandir, se reproduire, puis vieillir et mourir, chacune des 140 pages du livre est conçue comme un moment scandé et circonscrit, une unité graphique avec son propre rythme narratif, ce qui fait du récit un étrange documentaire animalier, à la fois grave et fantaisiste, dans lequel chacun peut retrouver une part de ses souffrances, ses difficultés mais aussi ses moments d'insouciance et de grâce.La diversité des situations nous amène dans les montagnes enneigées, au fond de l'océan, sur des îles paradisiaques, et n'épargne pas le lecteur ! Stéphane Noël est un des membres de l'Employé du Moi. Après avoir participé à plusieurs collectifs et dessiné Ressources humaines dans la collection Vingt-Quatre de l'Employé du Moi, il livre ici un récit de plus de 140 pages au dessin fin et régulier, entamé il y a plusieurs années et en partie pré-publié sur le site Grandpapier.
Alors que la ferme familiale périclite, Arvo, le plus entreprenant des frères Ukkometsola, décide de lancer un business de lait porcin et de sperme avec l'intention de faire fortune. Il embrigadesa compagne ainsi que ses deux frères, malgré eux. Son manque d'expérience apparaît au grand jour mais Arvo s'obstine. Entre Steinbeck et « La merditude des choses », le livre sonne comme une débandade, une suite d'échecs auxquels répondent une frustration grandissante. L'auteur fait le portrait de trois frères portés par des désirs clairs mais sans aucune capacité de les atteindre tant ils entrent en contradiction avec leurs pulsions. De ce décalage entre leur détermination et l'évidence de leur inaptitude, naît un humour noir, cruel et burlesque. Jarno Latva-Nikkola s'appuie sur un traitement graphique sale et énergique pour soutenir le sous-texte sexuel et scatologique et refléter l'intériorité chaotique des protagonistes. Alors que les pays scandinaves passent souvent pour des modèles de progrès social et de réussite économique, Arvo, misogyne, raciste et brutal, représente une autre Finlande, rurale et réactionnaire. Un ancien monde aux prises avec les difficultés socio-économiques de la transition industrielle. Les frères Ukkometsola est une plongée singulière dans le « white trash » à la finlandaise signée par l'une des vedettes de l'underground finlandais !